J’en ai marre qu’on me regarde avec commisération parce que je suis français


Avec la répétition des attentats perpétrés sur le sol hexagonal, je suis devenu, aux yeux de la population de ma ville d’adoption, une espèce à protéger et à chérir.

Autrefois, quand le Français s’établissait à l’étranger, il ne suscitait que méfiance et réprobation. Il puait, il prenait des douches une fois l’an, il ne se lavait jamais les dents, il ne pensait qu’à baiser et à regarder sous les jupes des filles, il se prenait pour le nombril du monde, il débordait d’arrogance, il était paresseux, il piquait la femme des autres, il rechignait à apprendre la langue de son nouveau pays, il comparait toujours tout avec la France.

Et il était aimable comme une porte de prison.

Quand il disait être originaire de Paris, on le regardait avec des grands yeux envieux. Ah Paris, j’y suis allé il y a 26 ans, c’était merveilleux, ah Paris, je voudrais tellement que mon mari m’y emmène, ah Paris, c’est si romantique, ah Paris, ma ville préférée au monde, ah Paris, ah Paris, ah Paris.

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Je laissais ces braves gens à leurs rêves.

Je ne leur disais jamais que Paris c’était l’enfer, que j’avais vivoté pendant des années dans un vingt mètres carrés avec vue sur le périph pour lequel je payais un lingot par mois, que Paris puait, que les Parisiens étaient des têtes de nœud, que Paris c’était juste un musée, un décor de carte postale tout juste bon à épater le touriste de passage mais que derrière ce n’était que saleté et désolation.

Depuis les attentats tout a changé. Tout.

On prie pour moi, la concierge me demande toutes les deux secondes si je n’ai besoin de rien, si tout va bien chez moi, si tout le monde est hors de danger ; je suis à peu près certain que si demain, je venais lui annoncer que dorénavant, je m’abstiendrais de lui verser l’argent du loyer, elle me dirait ” ce n’est pas grave, je comprends, vous me payerez quand vous pourrez”.

Le voisin qui d’habitude ne m’adressait jamais la parole, me croisait dans les escaliers comme si j’étais le fantôme de l’opéra, se débrouillait toujours pour me piquer ma place de parking, désormais, il m’invite à venir dîner chez lui, il débouche des bouteilles de vin hors de prix ; avant-hier il m’a même présenté sa femme qui elle aussi, le lendemain, a tenu à me consoler mais à sa manière.

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Dans la rue, au supermarché, à la banque, tout le monde me regarde avec commisération. On est avec vous. Je suis tellement désolé de ce qu’il vous arrive. Si vous avez besoin de quoi que ce soit, n’hésitez pas. Je prie pour vous, vous savez. Vous êtes tellement courageux. Je me tiens à vos côtés. Vous êtes libre pour un barbecue ? Je réunis quelques amis et j’aimerais tellement vous compter parmi nous.

J’ai honte. Je n’en peux plus. J’ai l’impression d’être devenu un SDF, l’ombre de mon ombre, un paillasson sur lequel tout le monde pleure. Je ne fais plus peur à personne. Mon arrogance a comme disparu. On me laisse tout passer. J’ai tous les droits. Si je lançais une collecte dans l’immeuble, je suis sûr qu’à l’heure actuelle, je serais déjà millionnaire. Ma place de parking n’est plus jamais occupée. Quand je descends mon linge à la buanderie, on s’empresse de ranger ses affaires pour me laisser une machine de libre.

Je suis Français putain, j’ai envie de crier, pas Yougoslave ou Rwandais. J’ai du sang bleu qui coule dans mes veines. Je possédais des colonies, la moitié de l’Afrique. Je régnais sur les océans. J’envahissais l’Europe. Je semais la terreur. Je résistais à l’envahisseur nazi. J’étais le centre de l’univers. J’étais le soleil de ce monde.

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Maintenant, je ne suis plus rien.

On marche pour moi, on colore l’hôtel de ville de mes couleurs, on me montre à la une des journaux, en pleurs, à genoux, entouré de cadavres, on me plaint du matin au soir et toutes les églises de la ville prient pour moi.

Encore un attentat et je rentre au pays. La comédie a assez duré. Je m’inscris aux primaires de droite, je triomphe, je m’installe à l’Élysée et je rétablis la France dans son honneur bafoué.


Et, mon devoir une fois accompli, je reviens ici et repars culbuter la femme du voisin !

                                                                                                                                                                              Pour suivre  l’actualité de ce blog, c’est par ici : https://www.facebook.com/pages/Un-juif-en-cavale-Laurent-Sagalovitsch/373236056096087?skip_nax_wizard=true

6 commentaires pour “J’en ai marre qu’on me regarde avec commisération parce que je suis français”

  1. Il vaut mieux ce regard au Canada que les regards sur les musulmans ici en France .

  2. Un article pas mal. mais le texte d’intro de l’auteur à côté de pseudo rebelle stéphanois est d’un ridicule…

  3. Mais quéquidit Romain ,bouh.!

  4. Euh … en attendant que vous soyez à l’Élysée, je veux bien prendre soin de la voisine

  5. J’en connais une de concierge et j’ai juste envi de l’étrangler, un truc d’un autre temps. A part ca on devrait balancer deux ou trois bombes nucléaires et tout redeviendrait en ordre.

  6. Enfin bon j’ai pas la même concierge mais c’est vrai que si t’arrives à faire oublier un loyer là je comprends

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