Sauvons la Grèce avec un crowdfunding interplanétaire


(Oui, je sais, telle entreprise a déjà vu le jour. Sauf que je proclame ici, en jurant sur la tête de mon chat, que j’ai bel et bien été le premier à accoucher d’une pareille idée. En effet, ce papier a été composé puis posté dans la nuit de lundi à mardi, très exactement à 3h31 du matin. J’ai des preuves, des témoins en veux-tu en voilà, des serments de paternité, des test ADN qui le certifient. Cette mise au point étant faite, je vous souhaite une bien agréable lecture.) 


                                                                     Je n’ai jamais mis les pieds en Grèce, je ne danse pas le Sirtakis ou alors seulement quand j’ai biberonné une bouteille d’Ouzo cul sec ; quand je vois un pope qui s’avance vers moi, je change de trottoir illico, je ne supporte ni l’Olympiakos et encore moins le Panathinaïkos, et le seul grec ou apparenté grec de valeur que j’aie jamais connu s’appelait Triantafilos et jouait pour l’Association Sportive de Saint-Etienne (Les Verts, pour les circoncis du foot) dans les années soixante-dix.

Pour autant je sais une chose, une seule : sans les Grecs, sans leur génie immortel, sans leur apport déterminant, nous en serions encore à chasser le mammouth, à nous gratter les couilles en nous demandant comment peut bien pousser une marguerite, à vivre dans des grottes insalubres puant le buffle mouillé, à taper sur nos femmes à coups de silex pour se plaindre de la cuisson du sanglier, à prier des demeurés de demi-dieux et à être aussi utile à l’humanité qu’un escargot asthmatique.

La civilisation européenne naît avec la Grèce, et ma mère m’a toujours appris qu’il fallait se montrer reconnaissant vis-à-vis de celui qui le premier a inventé la recette du couscous, sans quoi on en serait encore à bouffer des grains de blé moulus, à l’eau et sans boulettes.

Et de vous à moi, j’échangerais bien toute la littérature mondiale contre un seul chant de l’Iliade.

Bref, toutes ces circonvolutions foireuses pour arriver à vous dire, qu’en conscience, je ne peux rester indifférent au sort réservé à mes amis grecs, dont par ailleurs je me contrefous de savoir s’ils ont ou non payé leurs impôts à temps. Ce qui est fait est fait.

Ou si au lieu de travailler comme n’importe quel européen de souche, ils ont préféré s’enfiler des tartines de tarama en regardant les lumières du Pirée s’allumer une à une dans le crépuscule ensanglanté de la mer Égée qui, si ça se trouve, ne borde même pas Athènes mais je ne suis plus à une approximation près.

N’ayant aucune compétences en économie – je crois encore que le PNB est le sigle du Parti Nihiliste Belge et le FMI la Foire à la Masturbation Internationale  – je me sens donc tout à fait légitime pour proposer une solution au soi-disant problème grec.

Je propose donc, via un site de crowdfunding ou comme dirait mes amis québecois, un site de sociofinancement ou de financement participatif, Kickstarter, Leetchi, peu importe, de lancer un appel aux dons qui, pour une fois, ne concernerait non pas ses rappetouts de banques centrales, non point ces jobards des grands fonds d’investissement, encore moins ces salopards de hedge funds, mais s’adresserait à nous, simples citoyens d’une Europe qui nous ressemble de moins en moins.

Et qui creuse avec une obstination rare sa propre tombe sous les coups de boutoirs de ronds-de-cuir aussi sympathiques et aussi alertes intellectuellement que Brigitte Bardot quand elle se prend pour la réincarnation de Virginia Woolf.

Un grand élan de solidarité, qui s’affranchirait de la tutelle de nos gouvernants, ferait la nique aux marchés financiers et autres  banques centrales, et permettrait à la Grèce de retrouver des couleurs.

Chacun donnerait selon ses moyens : un euro, dix, vingt, cent, mille.

Dans l’anonymat le plus total.

D’une manière totalement désintéressée.

Sans chercher un quelconque profit mais juste par souci de donner à un coup de main à son voisin qui, suite à une succession d’infortunes, de difficultés financières et d’impayés, se retrouve sur le point d’être expulsé de sa maison.

Une simple entraide entre des gens de bonne volonté.

De la main à la main.

En échange de rien.

Animé de cette seule pensée que si jamais, par mégarde, il arrivait qu’un jour, à notre tour, nous ayons à subir ce même genre d’avaries, nous aimerions bien pouvoir compter sur la solidarité du plus grand nombre, et éviter d’avoir à composer avec notre banquier dont, à dire vrai, nous doutons de sa sincérité à nous aider vraiment.

Et puis aussi parce qu’un peuple qui nous a donné comme grands-parents des figures aussi illustres et recommandables que Sophocle, Euripide, Homère, Socrate, Platon… mériterait que pour une fois nous taisions nos égoïsmes imbéciles, nos pensées mesquines et nos rancœurs illégitimes.


Vous ne trouvez pas
?

                                                                                                                                                                                                                                                                                                          Pour suivre l’actualité de ce blog, c’est par ici : https://www.facebook.com/pages/Un-juif-en-cavale-Laurent-Sagalovitsch/373236056096087?skip_nax_wizard=true

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Je suis Tunisien


Je suis Tunisien.

Non, je n’essaye pas, au regard de l’effroyable massacre d’avant-hier, de m’approprier un nouveau slogan afin de montrer ma solidarité avec les malheureuses victimes de l’attentat ou affirmer ma solidarité avec la population locale.

Non quand j’écris ” Je suis Tunisien ”, je ne fais qu’émettre là qu’une simple vérité identitaire.

Je sais bien qu’avec mon nom à coucher à Moscou, avec ce patronyme qui sent bon le kolkhoze, les plaines de Sibérie et les romans de Dostoïevski, l’assertion a de quoi surprendre.

Disons que de se revendiquer de cette identité tunisienne semble être tout aussi incongru que si Poutine proclamait avoir des origines berbères, ou Marine Le Pen des ascendants chypriotes.

Et pourtant coule dans mon sang le parfum des jasmins, l’odeur des champs d’oliviers, les senteurs du thé à la menthe (et aux pignons), ces déclinaisons sensorielles si typiques de ce petit pays adossé à la Méditerranée.

C’est que, aussi loin que les généalogistes puissent remonter, ma famille du côté de ma mère a toujours résidé en ce pays.

Ma grand-mère est née à Tunis, ma mère à Sousse, mon grand-père est enterré dans cette même ville et j’ai pour ce pays un attachement d’autant plus marqué que je fus élevé en partie par cette grand-mère qui, condamnée à quitter son pays natal lors du processus de décolonisation, garda toute sa vie durant une nostalgie féroce de sa Tunisie chérie, à mi-chemin entre l’amertume d’avoir dû l’abandonner et la reconnaissance d’y avoir vécu.

Tout comme ma mère.

Elle était née dans un pays béni des Dieux, cette Tunisie intemporelle éclairée par le chaud soleil de l’Orient, baignée par une Méditerranée de carte postale, illuminée par l’azur enchanteur d’un ciel fiancé avec l’éternité, cette tendre alliance de la lumière et de la mer, si propice à cette douceur de vivre qui marqua à tout jamais sa jeunesse.

Et la mienne aussi.      

J’ai grandi avec les souvenirs de la Goulette et de la Marsa, de Gammarth et de Carthage, de Sidi Bou Saïd et de Nabeul, d’Hammamet et d’Hammam Sousse.

Avant même d’y séjourner, je savais la morsure du sable brûlant sur la paume des pieds,  je connaissais la langueur des siestes pratiquées derrière des volets clos, dans le chuchotis de la maison où à la cuisine, grain après grain, ma grand-mère confectionnait ce couscous qu’elle servirait le soir venu accompagné de boulettes gouleyantes de pommes de terre et d’artichauts.

Plusieurs fois, nous retournâmes en ces lieux prisés des Dieux.

Le gouvernement ayant confisqué arbitrairement leurs champs d’oliviers et l’argent l’accompagnant, avait consenti à ce que nous puissions dépenser une somme forfaitaire de dinars à chacune de nos visites.

Il fallait toujours batailler avec le responsable du compte pour qu’il nous délivre quelque argent, ce qui nous permettait de partir sur les traces de leurs vies passées, revisitant ces maisons, ces rues, ces quartiers où Juifs et Arabes avaient durant des temps immémoriaux appris à gommer leurs différences pour mieux vivre dans une relative harmonie et un sens réel de la concorde.

Je ressentais alors toute cette palpitation d’un pays doué pour le bonheur, où le blanc des maisons se mariait avec le bleu du ciel, dans des épousailles si parfaites  qu’elles donnaient naissance à une félicité qui ne pouvait être que l’apanage de quelques divinités ayant élu domicile en ce paradis terrestre.

Et si aujourd’hui, je vis loin d’elle, en des contrées reculées, je continue à me sentir et à me revendiquer, aussi étrange que cela puisse apparaître, comme Tunisien.

J’ai en moi, tapi dans le repli de ma conscience, à l’ombre de mon cœur naufragé, parmi le désordre de mon âme déchirée, le goût de l’indolence, l’appétence pour des nourritures grasses et réconfortantes, l’inclinaison à l’hospitalité que viennent contrebalancer mes origines russes, qui me poussent à fuir ce même soleil que ma mémoire recèle, à abriter une litanie de tourments, à devoir cohabiter avec une attirance certaine pour tout ce qui est sombre, noir, désespéré.


Et si je suis une terre de contraste, je n’en demeure pas moins ce fils de Lisette et ce petit-fils d’Yvette M. qui m’ont transmis, à leur manière, l’amour immodéré pour ce pays nommé Tunisie.


Je suis Tunisien.

                                                                                                                                                                                                                                                                                                        Pour suivre l’actualité de ce blog, c’est par ici : https://www.facebook.com/pages/Un-juif-en-cavale-Laurent-Sagalovitsch/373236056096087?skip_nax_wizard=true

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Le scandale de vivre à deux dans un trente mètres carrés


Longtemps, j’ai vécu à Paris.

Trop longtemps assurément.

Et si j’ai fini par quitter cette ville qu’avec le temps j’ai appris à haïr, c’est que tout simplement elle condamne par la folie de son marché locatif ses habitants les moins fortunés à vivre dans des habitations aux dimensions si mesquines qu’il leur arrive parfois de jalouser le sort d’un détenu confiné dans sa cellule individuelle.

Ce n’est pas tant une question de prix, même si ceux-ci sont de toute évidence scandaleusement élevés, qu’un problème d’espace.

Après diverses expériences plus ou moins heureuses, en des beaux quartiers tout aussi bien que dans des arrondissements plus populaires, j’en suis arrivé à la conclusion que de vivre à deux, avec ou sans chat, dans un appartement ne dépassant point les quarante/cinquante mètres carrés, s’apparente ni plus ni moins à une atteinte à la dignité humaine.

On ne peut concevoir de mener une vie de couple avec tous ses aléas dans un réduit qui, outre une cuisine qui rendrait claustrophobe un hamster, une salle de bain où vivote une misérable douche en grande conversation avec un lavabo écaillé, un cabinet d’aisance si étroit qu’il vous faut un trampoline pour attraper le papier-toilette gravitant au-dessus de votre tête, ne propose qu’une seule vraie pièce servant tout à la fois de salle à manger, de salon, de bureau, de chambre à coucher, de salle de relaxation, de cabinet de lecture, de refuge à des plantes vertes, d’accueil à des vêtements en déshérence, d’abribus et de chenil pour le chat.

Ce n’est tout simplement pas vivable.

Cette promiscuité forcée, cette cohabitation au forceps avec sa compagne ou compagnon, cette impossibilité d’avoir un espace à soi, cette obligation d’être à tout instant sous le regard parfois énamouré le plus souvent agacé de l’autre, exige des deux partenaires des sommets de patience, des trésors de diplomatie, des facultés à canaliser ses inévitables ressentiments qui dépassent de beaucoup les simples capacités humaines.

L’amour à ses raisons qu’une cage à lapin a tôt fait de rendre déraisonnable.

Comment voulez-vous évoluer dans un pareil décor quand, pour couronner une dispute, il n’existe même pas une misérable porte à même d’être claquée, hormis celle des toilettes, ce qui nécessite donc que pour marquer votre légitime exaspération, il vous faille quitter le lieu de l’altercation, s’enfermer dans votre urinoir, en ressortir, et alors et seulement alors, avoir ce rare privilège de régler son compte à l’unique porte de l’appartement (hormis bien évidemment celle de l’entrée) ?

Comment parvenir à vivre lorsque l’un veut se branloter le cerveau devant un match de foot tandis que l’autre s’essaye à lire Virginia Woolf, que votre chat joue à saute-moutons avec la table basse, que personne n’a eu le courage de débarrasser la table où agonisent désormais des assiettes repues de sauce tomate, que montent au plafond des miradors de livres menaçant à tout instant de s’affaisser, que glissent sur le parquet des fantômes de chaussures n’ayant point trouvé armoire à leur pointure, et que, où que se porte votre regard, il ne rencontre que la manifestation éclatante de la déconfiture existentielle qu’est devenue votre vie ?

Comment ne pas comprendre dès lors que les Parisiens soient les gens les plus affables, les plus avenants, les plus aimables, les moins irritables jamais recensés sur cette terre ?

Pour vivre à Paris il faut soit être immensément riche, soit sympathiser avec le caniche de la secrétaire de l’office HLM afin que votre dossier connaisse une soudaine crise de croissance, soit se résoudre à devenir alcoolique ou toxicomane ou les deux, afin que votre sens de la perspective devienne légèrement altéré et transforme votre vingt-deux mètres carrés en un vaste palais où flotte le souvenir de vos meubles IKEA.


Autrement c’est la garantie de finir en une du Parisien sous la mention “drame de la vie quotidienne” : un chat s’est immolé au 154 de la rue de Providence ; depuis deux jours il cherchait en vain la trace de sa litière.

                                                                                                                                                                                                                                                                                                                      Pour suivre l’actualité de ce blog, c’est par ici : https://www.facebook.com/pages/Un-juif-en-cavale-Laurent-Sagalovitsch/373236056096087?skip_nax_wizard=true

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Avec Twitter, la Terreur est de retour


” Comment faire tenir cinq millions de juifs dans une Fiat 600 ? Dans le cendrier.  ”

Pour ce tweet, posté en  2011, Guillermo Zappata, fraîchement promu conseiller à la culture et aux sports par la nouvelle maire de Madrid, a été congédié suite à une intense campagne menée sur les réseaux sociaux l’accusant d’antisémitisme aggravé.

J’ignore tout de ce Zappata.

Pour sa défense, il a tenu à préciser : ”J’ai toujours aimé l’humour noir et cruel car je considère comme une expression saine de se moquer des horreurs commises par nous autres êtres humains ”

J’insiste : je ne sais rien de ce monsieur, de son parcours, de ses prises de position, de son engagement idéologique si ce n’est qu’il se trouve appartenir au mouvement des Indignés espagnols, j’ignore s’il était coutumier  de ce genre de réparties ou pas, s’il s’était déjà illustré dans le passé par des propos similaires.

La seule chose que je puisse affirmer est que cette ” blague ” connue et archi-connue, ne me paraît relever en aucun cas d’un antisémitisme plus ou moins latent.

Je ne vois là aucune expression visant à stigmatiser la communauté juive, à la dénoncer en tant que telle, à la pourfendre ou à porter atteinte à son honneur.

En tant que Juif, je ne me sens ni sali, ni attaqué par une pareille répartie.

Je suis à peu près certain de l’avoir déjà entendue un millier de fois et il se peut fort bien que moi-même je l’ai ressortie lors d’une conversation.

Le fait qu’elle émane d’une personne nullement de confession juive ne me semble pas constituer un facteur aggravant qui tendrait à prouver que cette dernière fut animée d’intentions malfaisantes visant à se moquer expressément des Juifs.

Si je la prends dans le strict cadre de son intitulé, je la trouve non pas drôle dans la mesure où elle ne déclenche en moi nul rire tonitruant, mais plutôt teintée d’une féroce dose d’humour noir permettant précisément de résumer en une formule lapidaire et cinglante ce que fut l’innommable horreur de l’Holocauste.

Oui, si l’on y réfléchit bien, c’est très exactement ce en quoi consistait la barbarie nazie : vouloir réduire le peuple juif à un tas de cendres en l’exterminant dans des chambres à gaz et autres fours crématoires.

Plus qu’une blague, cette formulation m’apparaît dès lors comme une métaphore certes cruelle, certes carnassière, certes dévastatrice, mais néanmoins pertinente de l’immonde réalité de l’Holocauste.

C’est la mission même de l’humour et de l’humour noir en particulier d’être capable de traduire par un trait d’esprit l’indicible horreur d’un fait qui par sa monstruosité nous dépasse.

De dire et dénoncer l’insoutenable en confiant aux mots la lourde change de transcrire l’épouvante qui peut nous saisir quand nous nous retrouvons confrontés à un événement dont nous ne pouvons ni comprendre ni accepter la teneur et la portée.

C’est par le rire que nous accédons à la vérité de la condition humaine. 

Pour mieux dire, ce n’est en rien minimiser l’Holocauste que de tenir de tels propos dans l’exacte mesure où la personne qui les énonce ne se réjouit pas du sort réservé au peuple juif durant la seconde guerre mondiale.  

Pourtant la vox populi a en a décidé autrement.

Sans savoir le pourquoi du comment, elle a tranché.

Unanime dans sa répréhension, elle a hurlé à antisémitisme.

Elle a demandé, réclamé, exigé la démission de l’auteur de ce tweet.

Et évidement elle l’a obtenue.

Tout comme elle a obtenu la démission du Prix Nobel de médecine Tim Hunt pour ses propos sexistes où le brave homme conseillait d’éviter d’intégrer une femme dans un laboratoire de recherche sous prétexte que ”vous risquiez soit de tomber amoureux d’elle, soit qu’elle tombe amoureuse de vous, soit qu’elle se mette à  pleurer si vous la critiquez ”.

En quelques heures là aussi son compte était bon.

Sans autre forme de procès, sans qu’il puisse présenter une quelconque défense, s’expliquer devant un jury, dire le fond de sa pensée, il a été licencié manu militari de l’université où il travaillait depuis des lustres.

Parce que là aussi, la vox populi, la sacro-sainte populace, réincarnation de l’antique sagesse populaire, via les réseaux sociaux, ces nouveaux démiurges de l’époque moderne qui font et défont les réputations à la vitesse de la lumière, sans aucune autre forme de discernement, l’avait dûment exigé.

Dans le dernier cas, il est à noter toutefois que la phrase était d’une stupidité particulièrement crasse.

Pour autant, on peut tout de même s’interroger sur la proportionnalité de la sanction, sans être à son tour battu à mort.

Un simple blâme, une mise à l’écart temporaire, la lecture obligatoire du “Deuxième sexe” de Simone de Beauvoir, eût largement suffi pour faire entendre raison au chercheur ou lui signifier qu’on ne saurait tolérer à l’avenir la tenue de tels propos.

Sauf que l’époque n’est pas à la nuance.

Il faut frapper fort, là, maintenant, de suite, sans plus attendre.

Amener l’accusé sur le bûcher de l’opinion publique, lui réciter le procès verbal des faits qui sont reprochés et actionner au plus vite la guillotine.

Le peuple veut du sang, le peuple aura du sang.

Certains trouveront un tel empressement salutaire.

Un refus désormais bien établi de ne plus laisser passer la moindre entorse à la morale publique, d’extirper du champ de la société civile toute personne tenant ou ayant tenu des propos jugés offensants ou blasphématoires, et d’actionner le glas de la justice pour cesser de tolérer tout manquement à la dignité humaine.

Il reste qu’en agissant de la sorte, dans cette frénésie d’un nouvel ordre moral, tôt ou tard, l’accusateur deviendra accusé.

Que la terreur régnera un peu partout, que la bienséance remplacera l’impertinence, que tout usage d’une métaphore sera désormais interdite.

Ce sera la mort du langage, le triomphe de la médiocrité ambiante, l’uniformité de toutes les opinions.

Le règne du politiquement correct, ce poison qui s’instille dans les consciences, atrophie les imaginaires, aseptise les appétits de provocation.

Chacun possédant son particularisme bien à soi trouvera bien matière un jour ou l’autre à se plaindre du sort qui  lui sera réservé.


Avec la formidable caisse de résonnances constituée par les réseaux sociaux,
le monde ressemblera à une collection d’individus terrorisés qui s’appliqueront un sparadrap sur la bouche avant d’énoncer la moindre parole.


Effrayant,  non ?

                                                                                                                                                                                                                                                                                                       Pour suivre l’actualité de ce blog, c’est par ici : https://www.facebook.com/pages/Un-juif-en-cavale-Laurent-Sagalovitsch/373236056096087?skip_nax_wizard=true

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Le fantasme de la voiture sans chauffeur ou le summum de la connerie moderne


La dernière marotte de nos grands intellectuels qui se cachent derrière les mastodontes des géants de la communication serait donc de nous offrir à nous autres ploucs du quotidien la possibilité de conduire notre voiture à notre place.

Formidable invention.

On en salive d’avance.

Avoir la possibilité de grimper dans sa totomobile sans toucher à son volant, sans ferrailler avec sa boîte de vitesse, sans jouer des pédales, sans régler ses rétroviseurs, sans permuter ses phares, sans écrabouiller son klaxon, sans régler son chauffage, constituera à coup sur une étape cruciale dans l’achèvement de l’homme moderne.

Une véritable révolution.

On imagine déjà les possibilités infinies qu’une telle invention ne manquera pas d’engendrer : lire un poème de Baudelaire en allant acheter sa baguette, revisionner l’intégrale des films de Bergman dans leur version originale en descendant dans le sud de la France rendre visite à belle-maman, mater un bon petit porno avant d’entamer sa journée de travail, soulever des haltères en conduisant son chat chez le vétérinaire, se récurer simultanément les deux narines de notre fosse nasale en allant récupérer nos moutards à la sortie de l’école.

A nous la liberté.

La fin de notre asservissement à nos putains de berlines qui nous emprisonnent dans leurs carlingues castratrices et nous empêchent de vivre nos vies au maximum.

L’époque est au progrès tout azimuts.

Bientôt ce texte s’écrira sous ma dictée alors que je serai entrain de dévaler  des kilomètres sur mon vélo d’appartement qui d’ailleurs lui aussi roulera tout seul et pédalera dans le vide me laissant tout le loisir de demander à mon four de réchauffer le bœuf bourguignon que ma grand-mère viendra de me livrer par l’intermédiaire d’un drone.

Ma femme n’aura même plus à chercher d’amant pour tromper son ennui : on gardera au frais un bellâtre électronique qui revisitera le kamasutra pendant que ma tendre épouse s’entretiendra avec le garagiste pour savoir s’il a bien remplacé les circuits électriques du landau de la fille de notre voisine.

Je sens que je vais adorer le futur.

Je ne m’ennuierai plus jamais puisque je serai vingt quatre heures sur vingt quatre, sept jours sur sept, 365 jours sur 365 jours, connecté à la terre entière pour dire aux neuf ou dix milliards de couillons d’habitants qui la peuplent que je suis le plus heureux des hommes, que je m’éclate, que là, tel que tu me vois cher ami,  je suis en train de regarder Avengers 145-Le Retour du Dragon pendant que ma voiture gravit comme une grande l’Alpe d’Huez et que je m’apprête à commander le dernier modèle de chien intelligent sur Amazon, celui qui recycle lui-même ses crottes.

On ne s’imagine pas le temps qu’on perd en voiture alors que nos vies sont si courtes, que tout ce temps gaspillé à contempler la nature alentour, à penser dans la solitude de son esprit à nos vies qui se délitent, on pourrait le rentabiliser au maximum, être constamment sur la brèche, ne plus être coupé du monde mais en résonance perpétuelle avec lui, être tenu au courant minute par minute du déroulé de la prise d’otage venant de survenir dans la banlieue nord de Shanghai, savoir tout sur tout, tout le temps, à la seconde près.

Pouvoir continuer à consommer, à consommer encore et toujours, alors qu’on se retrouve bloqué dans un embouteillage, au ralenti sur le périphérique, à l’arrêt au péage de Fleury-Mérogis. 

Ne plus jamais être seul avec soi-même.

Ne plus jamais goûter au plaisir de conduire, de ne plus sentir nos pensées palpiter, dériver au fil des kilomètres et nous permettre de réfléchir à ce que nos vies sont devenues : des simulacres d’existence où sur l’autel de l’hyper-connectivité nous aurons fini par sacrifier tout contact avec nous-mêmes, ce sentiment si précieux de l’effrayante beauté du monde alentour, l’angoisse à être dans un univers qui nous demeure et nous demeurera à jamais étranger.


Cette sensation d’être vivant malgré tout.


Vivant bon sang.

                                                                                                                                                                                                                                                                                                      Pour suivre l’actualité de ce blog, c’est par ici : https://www.facebook.com/pages/Un-juif-en-cavale-Laurent-Sagalovitsch/373236056096087?skip_nax_wizard=true

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Les Apprentis, un film culte toujours culte


Les plus grandes comédies sont celles qui parviennent à s’inscrire dans la temporalité de leur époque tout en demeurant drôle sous toutes les latitudes et à toutes les époques.

Et parce qu’elles provoquent le rire, cette denrée qui ne court pas les rues et rend la vie supportable, elles nous sont essentielles pour nous maintenir à flots et enjoliver notre quotidien.

Il existe deux comédies qui ne manquent jamais de me plonger dans un état de ravissement proche de l’extase, Oscar d’Edouard Molinaro et Les Apprentis de Pierre Salvadori.

Oscar, c’est de Funès au sommet de son art, comique funambule pétaradant de folie qui, avec une virtuosité inouïe, dans un mélange fracassant de burlesque et de comédie de boulevard, emporte tout sur son passage.

Les Apprentis, c’est le tandem François Cluzet/Guillaume Depardieu qui détricote avec une jubilation de tous les instants le malaise d’une génération refusant les codes du travail organisé pour tenter malgré tout de survivre.

Une ode aux paumés du quotidien qui vont de galères en galères, de petits boulots en boulots de fortune, de débrouillardises précaires en escroqueries minables afin de rester en dehors de la rumeur du monde qui menace de tout emporter sur son passage : nos amours, nos idéaux, nos rêves.

C’est un couple merveilleux de pieds-nickelés à la petite semaine qui ne savent pas comment vivre, ne l’ont jamais su, ne veulent même pas le savoir.

Ils vont à cloche-pieds dans la vie.

Ils piquent dans des supermarchés de la bouffe carrée, ils carburent à la vodka de supérette, ils squattent l’appartement d’un ami qui lui a réussi, ils s’enfoncent dans les méandres d’une existence impossible, ils cherchent l’amour mais l’amour se refuse à eux, ils s’agrippent l’un à l’autre pour ne pas tomber dans le ravin.

Ils vacillent, ils flirtent avec les abîmes, ils se compromettent, ils baisouillent comme ils travaillent – à l’occasion – ils angoissent, ils dépriment, ils galèrent, ils avancent en reculant, ils essayent de rester dignes, ils échouent, ils se soutiennent parce que ce qui reste quand tout a fichu le camp, les femmes, le fric, la respectabilité, c’est encore et toujours l’amitié.

Cluzet n’a jamais été aussi vrai, aussi authentique dans son rôle de naufragé professionnel, d’amoureux déchu, d’écrivaillon à la dérive assez lucide pour se voir tomber mais incapable de reprendre la barre d’une existence qui part en lambeaux et s’enfonce dans les ténèbres.

Guilllaume Depardieu demeure tout au long du film merveilleux de spontanéité, de fraîcheur, de naïveté.

C’est Candide parachuté dans un monde sans pitié.

Branleur au grand cœur, pur parmi les purs, copain prêt à tout pour sauver ce qu’il reste à sauver, il illumine de sa grâce toute adolescente la descente aux enfers de ces deux handicapés de l’existence.

Mais le film tient aussi, tient surtout par sa parfaite écriture.

C’est un modèle de scénario, un festival de dialogues épiques, une succession de réparties savoureuses, un empilement de bon mots jubilatoires dont la seule évocation peut provoquer le rire longtemps après avoir vu le film.

De ”On n’a pas une vie saine, Fred, on mange n’importe comment, on ne vit pas normalement, on boit trop, faut qu’on se reprenne ” à ”Maths Sup, Maths Spé… j’hésite encore… ” en passant par ” Pourquoi six cylindres c’est mieux que quatre ? “.

Comme une bouffée d’enfance.


C’est un film à voir ou à revoir qui mieux que n’importe quel ouvrage sociologique a su saisir l’humeur et l’envers d’une époque qui depuis la sortie du film en 1995 n’a cessé de se dégrader : une époque où trouver un simple toit se transforme en une quête existentielle, où ne pas vivre dans les clous signifie signer sa mort sociale, où l’amitié, malgré tout, résiste à tout et finit par triompher.


Les temps modernes, en somme.


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Quand je vois mon chat, je vois Dieu


Je ne suis pas croyant.

Enfin je crois que je ne le suis pas.

Si je le suis, c’est à mon corps défendant.

De toutes les façons, je ne suis pas doué pour la métaphysique.

Il me suffit de penser à l’infini pour avoir le tournis.

J’ai constamment à l’esprit cette phrase de Leibnitz, ” Pourquoi il y a-t-il quelque chose plutôt que rien ? ”

Et rien que d’écrire cette formulation, j’ai déjà la tremblote.

C’est terrible de penser trop.

On finit par devenir fou.

Surtout si on ne possède pas – et je suis hélas dans ce cas – une de ces intelligences froides et critiques capables de se lancer dans des raisonnements abstraits et compliqués sans risquer un infarctus du myocarde.

Si bien que concernant Dieu j’hésite encore.

Je n’ai pas tranché la question.

Je réserve ma réponse pour plus tard.

Pourtant s’il existe une chose, une seule, qui serait à même de m’amener à croire en la possibilité d’une puissance supérieure, c’est bien mon chat.

Oui, mon chat.

Je le dis sans détour, quand je vois mon chat, je vois Dieu.

Le contraire n’étant pas (encore) vrai : quand il m’arrive de songer à Dieu, lors d’une rage de dents ou d’un découvert bancaire par exemple, je ne le vois pas affublé de moustaches, occupé à cavaler dans le couloir de mon appartement derrière des souris qui n’existeraient que dans son imagination enflammée.

Non, c’est seulement quand je contemple à la dérobée mon chat que j’en arrive à la conclusion qu’une telle créature aussi mystérieuse que parfaite ne peut être l’accident du hasard.

Ou le fruit de la rencontre entre deux atomes qui s’emmerdaient tant dans l’immensité des espaces infinis qu’ils décidèrent un beau matin de se percuter l’un l’autre pour se changer les idées donnant ainsi naissance à l’univers.

Je le dis tout net : l’idée du Big Bang n’est pas conciliable avec l’existence de mon chat.

Je veux bien admettre, si on me pousse dans mes derniers retranchements, que le grand dadais que je suis puisse avoir comme ancêtre des particules de poussières microscopiques mais pareille hypothèse, aussi séduisante soit-elle, ne peut s’appliquer à mon chat.

En aucun cas.

chat

Il suffit de le regarder un instant pour s’en convaincre : comment peut-on s’accorder avec l’idée d’un accident cosmique débouchant des millions d’années plus tard sur la naissance de la vie et de ses avatars, quand on a devant soi une telle manifestation de la plus parfaite des perfections ?

Comment concevoir qu’une créature aussi aboutie que mon chat puisse être née du néant ou de l’accouplement fortuit entre deux morpions d’atomes?

Comment justifier cette incarnation de l’Absolu par mon chat autrement que par l’émanation d’un Être Supérieur ?

Car tout est perfection chez mon chat.

Même quand il se met à se pourlécher le souvenir de ses testicules, ou à astiquer le pourtour de ce qui lui sert d’appendice rectal, il y met une telle grâce, un tel détaché, une si grande délicatesse, que non seulement on en vient à le jalouser mais que naît en moi la certitude de son ascendance toute divine.

L’élégance qu’il déploie en toutes circonstances , quand il dort, quand il court, quand il grimpe aux rideaux, quand il pourchasse une mouche, quand il engloutit ses croquettes, quand il frise des moustaches, quand il s’alanguit sur un tapis, quand il regarde par la fenêtre, quand il joue avec un macaroni, quand il se suspend au lustre, tout atteste qu’il est un animal métaphysique dépêché sur terre pour nous convaincre qu’un Grand Manitou nous observe, nous note, nous juge et nous attend par-delà notre mort pour nous dire nos quatre vérités.

C’est pour cela que j’ai décidé d’être enterré avec mon chat.

Avec lui à mes côtés, je ne crains rien.

Au moment où Dieu ou l’un de ses troufions d’assistants viendra pousser sa soufflante et me présenter l’addition pour tous les forfaits que j’aurai commis pendant me vie terrestre, je prendrai le fantôme de mon chat et le brandirai haut devant Lui.


Sitôt après, mon chat rentrera au Paradis et, pour avoir composé cet éloge, il me pistonnera pour que je l’accompagne.


La boucle sera alors bouclée.


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Manuel Del Dongo de la Valls, Seigneur d’Espagne, Roi de France, Prince du Barca


Ah ce que je puis souffrir à l’idée de pourfendre un homme dont l’extravagante passion pour le ballon rond est si forte qu’elle l’amène à adopter des comportements en tout point contraires à la morale élémentaire !

Pourtant, je sais d’expérience l’atroce douleur d’avoir à renoncer à assister à une rencontre de football auquel vous tenez tant que vous seriez prêt à tous les renoncements afin de ne point la rater.

Le mariage d’une tante prévue depuis des lustres qui, précisément, en vient à tomber le jour d’une finale d’une compétition majeure où s’illustre votre formation fétiche, l’impossible dilemme à résoudre, la panoplie des scénari que vous élaborez alors : l’annonce du déclenchement d’un tsunami inopiné même si vous habitez au cœur de la Creuse, un embouteillage monstre qui vous retient prisonnier à la hauteur du lieu-dit La mare au diable, le fiston atteint d’un accès de démence irrémédiablement contagieux, le décès soudain de sa propre mère qui, manque de chance, se trouve être aussi la sœur de la mariée…

Oui Manuel je sais cette intolérable brûlure qui consume le cœur, retourne l’estomac, assombrit l’âme au point de sentir monter dans la poitrine des sanglots de rage et de dépit mêlés, l’envie d’adresser un point vengeur vers le Créateur pour lui demander la raison d’une telle injustice, ce sentiment d’être la victime expiatoire d’un complot ourdi par des forces malfaisantes, cette conviction de passer à côté d’un événement d’une portée historique.

Et tout cela pour quoi ?

Pour se coltiner un congrès dont la terre entière se fout, vous le premier, une assemblée de militants ahuris venus se perdre dans le trou du cul de la France assister aux discours saumâtres de dirigeants ambidextres, pensant à gauche, réfléchissant à droite, gouvernant au centre ?

Conclave de petits caporaux dont, du haut de votre chaire de Premier Ministre de la République, vous maudissez l’irrémédiable petitesse, l’écœurant manque de courage, l’innommable appétence pour l’immobilisme, vous qui n’êtes que bruit et fureur, verbe haut et coup de menton, main sur le cœur et poing dedans les couilles.

Alors oui j’irai à Berlin !

A cheval, en vélo ou en Falcon.

Rien ne m’arrêtera.

On n’a qu’une vie.

J’entends déjà les vociférations de l’opposition, le bêlement de la vox populi grondant “mes impôts, mes impôts, mes impôts”, la désapprobation à peine muette du Président mais que sont-ce toutes ces lamentations face à l’incomparable, l’inexpugnable beauté de voir de mes yeux voir onze footballeurs incandescents réinventer l’art de dribbler, transcender la simplicité d’une passe, ensorceler le ballon dans une valse à jamais recommencée ?

Entre le PS et le football, je choisirais toujours le football.

Entre les impôts des contribuables et le football, je choisirais encore le football.

Entre la France et le football, je choisirais encore et toujours le football.

Je suis un homme entier.

J’ai horreur de tous les compromis.

Suis-je donc homme à me contenter de regarder pareille rencontre sur un téléviseur mal embouché, avachi sur un canapé de fortune avec comme compagnons de voyage ces impavides pachydermes que sont Michel Sapin, Jean-Christophe Cambadélis ou Jean-Marc Ayrault ?

Je suis le Premier Ministre de la France, pas un troufion de rond de cuir tout juste bon à cheminer sur les sentiers de la prudence en comptant chaque sou avec l’avarice d’un croque-mort.

Je vais, opiniâtre, orgueilleux, ombrageux vers le destin qui est le mien.

Je hais la tiédeur et le compromis, ces deux mamelles qui ont transformé ce pays en une nation rance suintant la mort et la désespérance.

Je réclame du panache, de l’insolence, de la bravoure.

De l’éclat avant toute chose.

De l’audace, encore de l’audace, toujours de l’audace.

Je me prénomme Manuel Del Dongo de la Valls, Seigneur d’Espagne, Roi de France, Prince du Barça.

Qui m’aime me suive.


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Confions l’organisation de la Coupe du Monde 2022 au tandem Israël/Palestine


Afin de se démarquer des scélérates pratiques mises en œuvres par l’infâme Sepp Blatter, j’invite le futur président de la FIFA à retirer au Qatar l’organisation de la Coupe du Monde en 2022 afin de la refiler aux deux enfants terribles de la diplomatie universelle, Israël et la Palestine.

A la seule condition que d’ici-là les deux entités nationales se soient entendues pour signer une paix éternelle, avant d’entamer une lune de miel couronnée par un échange de territoires juste et équilibré où chacun puisse vivre sa petite existence peinarde sans se soucier de se manger un tir d’obus ou de missile à l’heure du Shabbat ou pendant le Ramadan.

Ce très léger obstacle levé, plus rien ne s’opposerait à voir la Coupe du Monde débarquer en Terre sainte.

On n’aurait nul besoin de corrompre quelques intermédiaires véreux afin de s’attirer des votes bienveillants, personne n’osant présenter sa candidature face à un tel symbole qui magnifierait le vivre ensemble, la concorde entre tous les peuples de la terre, la réunion des hommes de bonne volonté.

Le match d’ouverture se tiendrait à Ramallah, la finale à Tel Aviv ou l’inverse, la rencontre pour la troisième place à Gaza.

La mascotte représenterait une colombe, habillée d’un pyjama étoilé et coiffée d’un keffieh de bon aloi.

Toutes les équipes participantes devraient avant chaque rencontre se taper et la visite du Saint-Sépulcre, et la promenade sur l’Esplanade des Mosquées, et la séance d’embrassade au Mur des Lamentations afin d’honorer les Dieux qui veillent depuis la nuit des temps sur la région et ses environs.

Les équipes se réclamant de Bouddha et consorts se contenteront d’un bain de pieds dans la Mer Morte.

Nombres de rencontres se disputeront sur le lac de Tibériade où, pour une fois, les joueurs marcheront vraiment sur l’eau et trouveront une juste récompense à leurs prières d’avant-match, le maître des lieux connaissant une nouvelle jeunesse en voyant ces jeunes gens de leurs foulées toutes jésuitiques gambader sur son terrain de jeu favori où il signa jadis l’un de ses plus retentissants exploits.

Ce bon vieux Moïse ne sera pas en reste.

Quand son équipe fétiche se produira, retrouvant ses vieux réflexes du temps de la sortie d’Égypte, il ne manquera pas de séparer le terrain en deux sitôt que l’équipe adverse osera déclencher une contre-attaque, de changer la pelouse en marécage lorsqu’un va-nu pied d’arbitre sifflera un penalty contre la sélection du peuple élu ou rajoutera un onzième, douzième et treizième commandement à ses Tables de la Loi en proclamant, du beau jeu tu pratiqueras, à l’offensive tu te lanceras, des buts par dizaines tu inscriras.

Allah quant à lui se contentera de faire disparaître le ballon dans les cieux au moment où il s’apprêterait à pénétrer dans les cages des équipes arabisantes.

Ce serait la Coupe du Monde de la fraternité, de l’émotion vraie, du triomphe de la lumière sur l’obscurité.

L’Homme, après des siècles passés à se chamailler, accéderait enfin à l’age adulte et, devant de telles marques de sagesse, les Dieux réunis en conclave décideraient de suspendre la Mort jusqu’à nouvel ordre.

Même Sepp Blatter serait pardonné.

Les Allemands, par devoir de mémoire, iront jusqu’à accepter d’être éliminés dès le premier tour.

 

Et évidemment c’est en rêvant à cette dernière impossibilité métaphysique que je me suis réveillé en sursaut.

C’est le problème avec les rêves les plus fous, il existe toujours un moment où la conscience, choquée par une énième incongruité, décrète la fin du couvre-feu et reprend les commandes.

Les Allemands éliminés au premier tour ? La bonne blague.


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Roland-Garros en streaming, c’est comme de rouler bourré, de nuit, sans phares, sur une départementale


J’ai parfois des élans suicidaires.

Des envies de me confronter à l’impossible.

De me surpasser, de m’affranchir du principe de réalité, de repousser les limites du genre humain et d’accéder ainsi au rang de demi-dieu.

C’est ainsi qu’hier, glandouillant mon ennui comme seul un prétendu écrivain sait le faire, après avoir joué à la marelle avec mon chat (j’ai gagné haut-la-main), je me suis décidé à regarder Roland-Garros. En streaming.

Roland et moi, c’est une vieille histoire.

Adolescent, quand je n’affolais pas les défenses adverses de mes dribbles envoûtants sur les terrains de foot où j’évoluais avec une grâce toute platinicienne, j’entretenais des affinités électives avec les petites balles jaunes dont je réquisitionnais l’attention pour dessiner de chatoyantes arabesques capables de désarçonner n’importe quel adversaire.

Étant haut comme trois abricots rassis, j’ai très vite compris que mon physique de nabot m’empêcherait de remporter quelques coupes autres que celle du tournoi annuel réservé à la catégorie des demi-portions de Juifs ashkénazes ne dépassant pas la hauteur du filet.

Ce qui ne m’a pas empêché de participer une année au championnat des Hauts-de-Seine qui se tenait à Roland-Garros.

J’ai dû y passer deux, trois tours, j’ai foulé la terre battue du court numéro 2 où selon toute logique mon glorieux souvenir doit encore planer, j’ai émerveillé de mon talent ineffable le cœur des spectateurs se résumant à mes parents et à ceux de ma malheureuse victime, je me suis hissé sur les mêmes chaises (sans aide d’escabot) où des générations de grands champions se sont assis en personne pour récupérer de leurs herculéens efforts.

Bref Roland et moi c’est du sérieux.

Étant un intellectuel de haut-rang, il se trouve que de téléviseur, je n’en ai évidemment pas, et résidant dans un pays qui ne possède avec la France que la langue comme unique point commun (et encore), ne pouvant donc accéder aux merveilles de France Télévisions, j’ai dû me résoudre à farfouiller dans les entrailles du net pour visionner la rencontre Nadal/Djokovic.

J’ai dégusté comme jamais.

Autant, avec le temps et l’habitude, je suis devenu expert dans l’art de mater du foot sur le net – j’anticipe les trajectoires du ballon, je devine les courses des joueurs, je flaire le but à venir avec la même opiniâtreté qu’un porcelet avisé débusquant une truffe dans un buisson de champignons – autant en tennis, j’ai de vraies lacunes.

Jusqu’ici, je n’avais jamais remarqué que la plupart du temps, les joueurs de tennis professionnels disputent ou plutôt miment des échanges où la présence de la petite balle jaune n’est pas requise ou alors sous la forme d’un vague cochonnet ayant la fâcheuse tendance à s’éclipser toutes les deux secondes.

C’est ainsi que j’ai assisté à des échanges de fond du court où Nadal et Djokovic ressemblaient à deux pantomimes débiles se renvoyant une ba-balle imaginaire dans une fiction de tennis à même de figurer dans une séquence des Temps Modernes de Chaplin.

J’ai vu de mes yeux vu Nadal commencer à réajuster son string et la seconde suivante, dans un fondu enchaîné tout godardien, martyriser une balle d’une torgnole de revers rebondissant dans les travées du court central, avant d’être récupérée par un fantôme de ramasseur de balle qui passait par-là.

J’ai vu des services gagnants atterrir dans le couloir. Des balles de break restées lettres mortes. Des slices rebondir à hauteur d’épaule.

J’ai vu Djokovic amorcer une tentative d’amortie qui au final, grâce à un fondu enchaîné des plus osés, s’est soldée par un lob magistral.

J’ai vu Nadal serrer le poing alors que le point n’avait point encore commencé.

J’ai même cru voir Nadal s’essayer à un service volée mais non, en fait, c’était juste Murray qui avait déboulé du court voisin sans crier gare.

A un moment j’ai même vu la Tour Eiffel effectuer un smash du fond de court renvoyé par l’Arc de Triomphe.

En fait je n’ai rien vu.

Rien vu du tout.

Juste deux branquignols de tennisman d’opérette qui ont passé le plus clair de la partie le cul vissé sur leurs chaises à attendre que la rencontre se termine. Et moi avec.


Dimanche, la finale ce sera sans moi.

Je verrai plutôt le Grand Prix de Formule 1 du Canada.

En streaming.


Je sens que je vais me régaler.


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