L’antiaméricanisme ou la haine contre soi


C’est la plus grande ineptie des temps modernes, la plus infrangible, la plus répandue, celle qui met tout le monde à peu près d’accord, j’ai nommé l’antiaméricanisme, qu’il fut primaire, secondaire ou tertiaire.

La plus bête aussi, tant elle exalte ces parfums délétères de la jalousie la plus mesquine, de l’aversion instinctive du petit propriétaire terrien crevant de rage de voir son cul-terreux de voisin, pourtant parti de rien, réussir bien mieux que lui dans ses entreprises agricoles.

Cette schizophrénie toute européenne de toiser cette Amérique du haut de son historie millénaire, de lui infliger leçons de morale et cours de maintien, de l’invectiver sur ses mœurs supposées barbares, tout en rêvant secrètement de lui ressembler.

Cette petite haine ordinaire, qui ne peut s’empêcher d’ouvrir grande sa gueule pleine de poison dès lors que l’Amérique ose intervenir dans son pré carré, et exiger d’elle de circonscrire son champ d’intervention sous peine d’être taxée d’impérialisme.

Cette manière que possède l’Europe de la renvoyer dans ses pénates, de la prier de s’occuper de ses affaires mais de l’appeler au secours dès lors que les vents mauvais de l’Histoire se mettent à souffler, acceptant cette fois son sacrifice, tout en regrettant déjà d’avoir été libérée par ceux qu’elle exècre tant.

Que ce fut lors des deux guerres mondiales, ou encore cette semaine quand il fallut attendre l’intervention de l’administration américaine pour mettre à genoux la FIFA, cette institution vérolée que chacun savait être corrompue depuis la nuit des temps mais dont personne n’osait ou ne voulait convoquer à la barre de la justice pour lui demander des comptes.

”De quoi je me mêle ?” a-t-on encore entendu, ”ce n’est pas vos oignons, vous ferez mieux de régler vos problèmes raciaux eu lieu de venir nous emmerder avec vos mises en accusation qui d’ailleurs ne vous concernent pas vraiment.”

Il faut être singulièrement borné pour oser demander à l’Amérique des comptes sur son traitement réservé à la communauté afro-américaine.

Non pas qu’elle soit exempte de tout reproche, loin s’en faut, mais difficile de s’ériger en donneur de leçon quand par le passé de telles questions identitaires ou raciales furent réglées sur son propre territoire à coups de camps d’exterminations, de chambres à gaz et autres fours crématoires.

Honnir l’Amérique et tout ce qu’elle peut représenter et incarner à travers sa culture ou son industrie, dont on s’abreuve pourtant le gosier en continu et à grandes goulées voraces, c’est avant tout se haïr soi-même, se cogner la tête contre le mur de sa propre incapacité à s’inventer de nouveaux mythes afin de suivre le train de la modernité, retourner sa colère de n’être plus le centre du monde contre cette nation née pourtant à son origine du désir d’expansion de nombreuses nations européennes.

Et à qui on reproche aujourd’hui précisément et souvent à juste titre cette volonté d’asseoir ce même désir de domination hors de ses frontières.

Le retour du refoulé.

La haine toujours recommencée envers le fils prodigue à qui on a donné la becquée et qui, une fois devenu adulte, se permet de venir jouer dans la même cour de récréation où jadis on régnait en maître.

Ce n’est pas la vieille Europe percluse de rhumatismes qui aura la peau de la FIFA.

Les connivences avec elle sont trop étroites, les intérêts trop partagés, la veulerie des gouvernements trop prononcée pour permettre une refondation complète de son mode de fonctionnement.

Osera-t-on décréter, par le biais de ses fédérations nationales, le boycott de toutes les compétitions organisées par les Maîtres de Zurich jusqu’à nouvel ordre ?

La Coupe du Monde de football féminin commence le 6 juin au Canada sous l’égide de la FIFA.

Pourquoi ne pas conditionner la présence de ses équipes nationales à la démission de Sepp Blatter, et imposer une nouvelle manière d’œuvrer au rayonnement international du football ?


Faudra-t-il donc encore attendre que ce soit l’Amérique qui donne l’exemple ?


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Chronique d’un dépressif joyeux


J’avais tout pour être un dépressif de premier plan.

Adolescent, je promettais.

Je possédais la panoplie complète des qualités requises pour prétendre être le plus grand dépressif de ma génération, toutes catégories confondues.

J’avais la mélancolie facile, j’écoutais des musiques à fendre un cercueil, je lisais des poésies sombres comme la mort, j’avais des crises d’angoisse si violentes que j’en venais à jalouser le sort des cancéreux en phase terminale, je ne me comprenais pas, je regardais ma main en me demandant à qui elle pouvait bien appartenir, je dégouttais d’une nausée existentielle que rien ne parvenait à apaiser.

Je me voyais déjà participer aux Championnats du Monde de la Dépression et remporter haut-la-main la compétition reine consistant à demeurer trois semaines dans un état catatonique à fixer un plafond en répétant toutes les cinq secondes ” je ne sais pas ce que j’ai mais je me sens fatigué, si fatigué.”

L’or olympique m’était destiné.

J’aurais écrasé la concurrence sans même avoir recours à des produits dopants, j’aurais été consacré Dieu vivant de la dépression, j’aurais été jalousé et envié, j’aurais suscité des vocations, des femmes auraient couché avec moi pour essayer d’attendrir mes peines : en vain.

J’aurais triomphé de toutes leurs tentatives, j’étais né pour le malheur et rien ne pourrait me détourner de ma route.

A l’âge de vingt ans, j’imaginais encore ma vie à venir comme un interminable chemin de croix où je ne connaîtrais jamais le repos, où sans relâche du matin au soir, été comme hiver, en automne aussi bien qu’au printemps, j’aurais à composer avec les tourments d’une existence si terne, si blafarde et si grise que mon âme suppliciée ne cesserait de gémir une lancinante musique lançant des appels désespérés à un ciel qui jamais ne me répondrait.

Je me voyais allant de maisons de repos en hôpitaux psychiatriques, accomplissant des passages prolongés dans des instituts hantés par des êtres aussi abîmés que moi, des êtres divorcés d’avec la vie, inaptes à toute vie sociale, emmurés en eux-mêmes, errant hagards dans des couloirs à attendre le moment d’absorber leurs doses de tranquillisants pour cesser de penser au naufrage que représentait leur passage sur cette terre.

Or, à ma grande déconvenue, il ne s’est rien passé de tel.

Non pas que je sois devenu un optimiste béat, un forcené du bonheur ou un fanfaron ivre de légèreté mais j’ai trouvé en moi assez de ressources pour affronter la vie sans avoir à mener une existence de martyr ou de damné.

C’est un miracle en soi qui recommence tous les matins.

J’ai déjoué tous les pronostics.

Bien sûr la vie me blesse constamment, bien sûr je suis incapable de fonctionner sans un recours constant à des supplétifs chimiques chargés d’équilibrer le flux de mes humeurs, bien sûr je vis avec la peur au ventre, bien sûr je suis d’une fragilité extrême, bien sûr le monde m’éprouve constamment, bien sûr l’infini de l’univers m’épouvante, bien sûr l’omniprésence de la mort me terrifie mais malgré tout je parviens à vivre debout.

A dire vrai je ne sais pas bien pourquoi j’ai si mal tourné alors que j’étais si doué pour le malheur.

Quelque chose n’a pas fonctionné.

Je n’ai pas répondu aux attentes que j’avais pu susciter.

Je suis comme une de ces jeunes pousses à qui l’on prédit une carrière sportive sans égal et qui, pour des raisons mystérieuses, ne parvient jamais à concrétiser les espoirs placés en lui.

Il demeure pour toujours celui qui aurait pu, aurait dû mais qui, au final, a failli dans les grandes largeurs.

J’arrive à rire de mes infortunes qui sont innombrables, ce qui demeure l’arme absolu pour ne point sombrer tout à fait.

Je n’entretiens aucune illusion sur l’existence, je connais sa parfaite vacuité, son irrémédiable petitesse, son écœurante étroitesse, je suis toujours surpris d’être encore en vie, je n’attends rien de rien, peu de choses arrivent à me surprendre, je n’ai aucune certitude, et si comme le disait le Poète, j’attends Dieu avec gourmandise, je ne suis pas non plus pressé de le rencontrer.


Je suis un dépressif joyeux
.


C’est navrant.


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Un cœur qui bat c’est une âme qui respire


Cette illustre phrase qui donne son titre à ce billet, je l’avoue bien bas, je l’admets, je le confesse, oui c’est moi et personne d’autre qui en est l’auteur.

Un cœur qui bat c’est une âme qui respire.

Elle figure dans mon troisième roman, l’inoubliable Loin de Quoi ?, œuvre magistrale qui signala mon entrée dans le club très fermé des romans s’étant vendus à moins de trois exemplaires, les deux courageux acquéreurs recensés étant mon frère et ma mère, même si je soupçonne cette dernière d’avoir menacé mon frère de le priver de couscous jusqu’à la fin de ses jours s’il ne se décidait pas à l’acheter.

C’est au début du livre.

Le personnage principal vient d’arriver à Vancouver, il est assis sur un banc face à l’océan et devant lui il voit défiler la moitié de la population de la ville affairée les uns à courir, les autres à pédaler sur leurs vélos supersoniques, les uns et les autres à pagayer sur l’eau et, confronté à cette débauche d’énergie des plus saugrenues, le voilà qui passablement énervé s’exclame :

On tourne un spot pour la santé civile, c’est ça ?

Un cœur qui bat, c’est un cœur qui respire.

Cette phrase, je tiens à le dire, était de toute évidence écrite sur un ton volontairement ironique, férocement comique, même Franck Ribéry s’en serait rendu compte sans l’aide d’un dictionnaire.

Pourtant, quelqu’un, je ne sais qui, ma mère peut-être ou alors mon frère dans un désir de se venger d’avoir dû débourser quelques euros afin de pouvoir continuer à s’empiffrer du couscous maternel, en a décidé autrement.

La prenant pour argent comptant, un infâme personnage, un traître, un félon, l’a détourné de son contexte, l’a isolée du roman, et sans mon autorisation, l’a consacrée comme un modèle de sagesse toute orientale.

Depuis, cette vraie-fausse citation d’une niaiserie sans nom, je la retrouve un peu partout.

Dans un blog consacré aux bienfaits de l’amour tantrique, au beau milieu d’un article sur le don d’organes, au détour d’un site venant en aide aux fumeurs désireux d’arrêter la cigarette, en propos liminaire d’une dissertation sur les palpitations sentimentales, en tête de gondole d’une fondation pour la venue de Bouddha sur terre, en première ligne d’une ligue anti-avortement.

Me voilà devenu bien malgré moi l’égal de Confucius, l’alter ego de Paulo Coelho, le frère siamois du Dalaï-lama.

Des jeunes filles en pleine pâmoison amoureuse récitent mon mantra à longueur de journée devant mon portrait accroché à côté de celui de Justin Bieber.

Des fumeurs, quand ils songent à replonger dans l’enfer de la cigarette, se reprennent au dernier moment en se remémorant mon sermon.

Je figure désormais en bonne place dans le dictionnaire des citations les plus illustres de la littérature française.

Le cœur à ses raisons que la raison ne connaît pas. Blaise Pascal.

Rodrigue, as-tu du cœur ? Pierre Corneille.

Un cœur qui bat, c’est une âme qui respire. Laurent Sagalovitsch.

Capture

Ce sera, je le crains, mon épitaphe.

Les futures générations la liront sur le fronton des écoles, des églises et des hôpitaux.

Le pape Raymond XXIII s’en servira pour mieux évangéliser des troupeaux égarés.


Dire que je ne suis même pas certain de croire en l’immortalité de l’âme.

D’ailleurs est-ce qu’au moins j’en possède une, d’âme ?

Et si oui, loge-t-elle dans mon cœur ou dans mon ventre comme les Amérindiens le pensent ?


Je songe désormais à publier un recueil de maximes du même tonneau.

Un couscous qui se réchauffe, c’est une cuisine qui respire.

Un chauve qui se gratte la tête, c’est un cerveau qui respire.


Et surtout,

Un pied qui démange, c’est un tibia qui respire.


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Confession d’un élève qui s’est toujours ennuyé à l’école


Je me suis toujours ennuyé à l’école.

Du matin au soir.

Du lundi au samedi.

De septembre à juin.

Classe après classe.

Je n’ai été ni un élève brillant ni un cancre absolu, juste un écolier, puis un collégien et enfin un lycéen parfaitement anonyme, d’une médiocrité absolue, s’efforçant juste de donner le change afin de contenter tout autant mes parents que mes professeurs.

Réussissant dans cette tâche avec plus ou moins de bonheur.

Sans aucune appétence particulière pour le travail, je traînais mon ennui d’heure en heure, de discipline en discipline, de salles de classes en salles de classes, écoutant d’une oreille distraite les savantes péroraisons de mes maîtres, que je m’efforçais de recopier sur mes cahiers transportés dans mon cartable avec le même enthousiasme qu’un employé des pompes funèbres retournant la terre fraîche pour accueillir un prochain cercueil.

Je n’étais ni heureux, ni malheureux, juste désireux que la journée s’achève enfin pour que je retrouve ma liberté, le décor familier de ma chambre où je pourrais à loisir m’oublier dans la lecture de mes livres préférés, reprendre le cours des parties de foot disputées dans le couloir de notre appartement contre des adversaires imaginaires, renouer avec cette vie secrète dont mes professeurs ne savaient rien.

Je ne chahutais jamais, je n’arrivais jamais en retard, je ne me faisais jamais remarquer, j’essayais d’apparaître le plus invisible possible, je restais impassible sur ma chaise à attendre que les secondes se transforment en minutes, les minutes en heures, les heures en journées, les journées en années, le regard rivé à la fenêtre où je sympathisais avec des oiseaux de passage.

J’étais là tout en n’étant pas là.

J’avais des amis que j’aimais bien, les mêmes camarades que je retrouvais année après année avec le même mélange de joie et de soulagement, ces mêmes figures familières qui permettaient de rendre supportable le carcan de cette existence passée entre les murs d’un lycée parisien aussi grand que laid, aussi fonctionnel que monotone, aussi triste que gris.

Je ne comprenais pas bien l’intérêt d’étudier, d’emmagasiner ces amas de connaissances dont je soupçonnais déjà la parfaite inutilité quand sonnerait l’heure de se lancer dans le grand bain de la vraie vie, ces équations, ces déclinaisons, ces règles qu’il nous fallait apprendre par cœur pour ne point être écarté du vaste troupeau des collégiens qu’on tenait en laisse afin de les mener à l’abattoir nommé baccalauréat.

Ce qui me frappe le plus avec le recul, c’est l’absence de toute joie.

Apprendre devrait être une fête de l’esprit tous les jours recommencée, et pourtant je ne me souviens d’aucun moment où j’ai pu sentir la palpitation de l’intelligence fondre sur mon cœur, où j’ai ressenti ce frisson d’être différent de celui que j’étais une heure avant, cette élévation de l’âme que seule la lecture sauvage de romans lus dans l’anarchie carnassière du vrai dévoreur de livres me permettait d’entrevoir.

Les mathématiques m’ennuyaient, les sciences physiques me désolaient, les sciences naturelles me désespéraient, l’apprentissage de langues étrangères me navrait, l’étude de la grammaire et de l’orthographe m’assommait, la confrontation avec des textes classiques me plongeait dans un désespoir sans fin, le récit des conquêtes napoléoniennes me laissait de marbre.

J’aimais apprendre par moi-même ; je ne voyais pas l’intérêt d’écouter les ratiocinations d’un professeur au sujet de la révolution française dans le décor chagrin d’une salle de classe, alors que j’aurais pu au même moment être allongé dans l’herbe occupé à dévorer les biographies de Marie-Antoinette ou de Fouché par Stefan Zweig.

Je n’ai rien retenu de mes années de lycée.

Elles ont sûrement contribué à façonner l’être que je suis devenu mais seulement parce que je me suis opposé à elles, que je n’ai pas voulu me laisser broyer par elles, que j’ai lutté de toutes mes forces pour ne point être englouti dans le sérieux d’une vie adulte qui m’apparaissait et continue à m’apparaître comme ce long et interminable et désespérant chemin vers la mort.

Au fond, je suis resté un enfant.


C’est ce qui m’aura sauvé.

                                                                                                                                                                                                                                                                                                              Pour suivre l’actualité de ce blog, c’est par ici : https://www.facebook.com/pages/Un-juif-en-cavale-Laurent-Sagalovitsch/373236056096087?skip_nax_wizard=true )

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Acheter des chaussures ou l’enfer sur terre


Arrive dans la vie d’un homme ce moment honni où il lui faut, plus par nécessité que par envie, déambuler dans les magasins de sa ville afin de renouveler cet outil indispensable à la bonne marche du monde, cette chose qui n’a d’autre intérêt à proposer à son utilisateur que de rendre plus aisé son déplacement journalier de son immeuble vétuste à son supermarché favori, j’ai nommé la paire de chaussures.

Il est à noter que la plupart du temps, l’homme ne se rend pas compte que sa seule paire de pompes, achetée il y a une bonne décennie, a dépassé depuis des lustres sa date de péremption : c’est seulement les remarques répétées de son entourage, les regards dégoûtés des autres passants, les remontrances incessantes de sa compagne qui finissent par le convaincre de l’absolu besoin de divorcer de ses loqueteux souliers au profit d’une paire plus présentable.

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Ne les trouvant point en vente libre à sa supérette de quartier où, entre un pack de lait, une boite de sauce tomates et un paquet de chips, il en aurait volontiers fait l’acquisition, le voilà forcé et contraint de se rendre en un endroit des plus saugrenus, hantés par des vendeurs n’ayant toujours pas compris la raison de leur présence en ces lieux hostiles, où se trouvent être jetés comme des réfugiés climatiques sur des étagères penchées, des myriades de paires de brodequins attendant tous d’être adoptés par des pieds charitables.

Le problème étant que rien ne ressemble autant à une paire de chaussures qu’une paire de chaussures, hormis quelques superficiels détails comme la taille, le poids et la forme des pompons rivés à la languette.

La même gueule patibulaire, la même terminaison en ovale plus ou moins pointu, la même hideuse configuration alliant une semelle lisse à une forme vaguement allongée, griffée ici et là de quelques motifs représentant des arabesques d’une indigence rare, où viennent mourir des lacets épuisés d’avoir croisé le fer avec des ouvertures chichiteuses entre lesquelles ils ont eu toutes les peines du monde à se frayer un chemin.

Une paire de chaussures est par essence d’une laideur incomparable.

Si vous vous surprenez à fixer sur elle un regard long de quelques secondes vous finirez par vous apercevoir qu’elle ressemble en tout point à un poisson avarié venant de succomber à un infarctus des plus soudains, intervenu au moment de reprendre son souffle, lui donnant l’apparence d’un hublot donnant à voir une mer d’immondices.

Et le prix ne change rien à l’affaire.

La personne qui ose dépenser plus d’une trentaine d’euros pour acquérir une chiure pareille souffre à coup sûr d’une dégénérescence mentale aggravée, d’un tel divorce avec le monde alentour, d’une distorsion avec le réel si profonde que seule une trépanation réussie parviendra à lui rendre toute sa raison.

Je puis comprendre à l’extrême rigueur qu’on puisse s’enthousiasmer pour un blouson, un chapeau, une chemise, un gilet, un veston, autant d’apparats visibles susceptibles de donner à celui qui les arbore une certaine élégance, un vague sentiment de porter beau, une manière de redonner à son corps un lustre depuis longtemps disparu, mais qu’attendre au juste d’une paire de babouches bien souvent cachées derrière un ourlet l’encerclant de toutes parts ?

C’est à peine si on les remarque car il faut être tout de même sacrément tordu pour s’intéresser de près à ce qui sert avant tout à masquer une paire de pieds sentant bon la sueur et la transpiration et permettre à sa voûte plantaire de fouler le bitume sans s’écorcher la peau, tout en la préservant du contact de déjections canines peu ragoûtantes.

Une chaussure sert à marcher, point barre.

Point à plastronner ou à fanfaronner ou à se la jouer comme Smalto.

Après avoir erré dans un magasin à la recherche d’une perle rare qui métaphysiquement ne pouvait exister, supporté une ambiance musicale ressemblant à une démo de New Order sous chimiothérapie, couru un marathon afin de me mirer dans le seul miroir situé au sous-sol du magasin, j’ai fini par dégoter une paire aussi inintéressante que possible : marron mais point trop, semelle juste assez blanche pour déceler toute apparition d’un début de fatigue existentielle et lacets tout aussi blancs en accordéon.


Et surtout enrobés dans un carton d’une magnificence telle que mon chat est venu baiser de ses moustaches reconnaissantes le cuir sentant neuf, avant de se contorsionner dedans avec la grâce d’une ballerine enfilant sa paire de pointes avant de se livrer à des entrechats virevoltants.


Maigre récompense.


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Le coup du Latin


Il existe deux constantes dans la longue histoire de l’humanité : le constat qu’après la pluie le soleil finit toujours par apparaître et le mécontentement généralisé, orchestré et répété du corps professoral à travers les siècles.

Que ce fut en Occident, en Orient, en Océanie, sur la lune, sous les océans, par-delà les pôles, dans la nuit profonde des galaxies, le professeur, peu importe la matière enseignée, a cette propension unique dans l’infinie cohorte des métiers répertoriés au livre d’or du Travail, de se plaindre, non sans raisons, de son sort, qu’il compare volontiers à celui d’un galérien contraint à ramer par des mers hostiles sous des vents contraires en essayant d’éviter de recevoir en pleine figure les chiures de mouettes étourdies par l’appel du large.

Il travaille trop, il est mal payé, il n’est pas respecté, a trop de copies à corriger, passe trop de temps à préparer ses cours, son collège est trop loin de son domicile, ses vacances trop longues, sa place de parking trop petite, ses élèves sont des cancres qui n’en foutent pas une, ses conditions de travail se détériorent à vue d’œil, ses collègues sont des ânes, son ministre de tutelle un pitre, les parents d’élèves des crétins incapables d’admettre qu’ils ont engendré, en toute logique, considérant l’étroitesse de leurs capacités intellectuelles, un corniaud absolu même pas fichu de repérer un verbe irrégulier dans une forêt de nombres premiers.

Il tempête, il rouspète, il vitupère, et en ce qui concerne la France, il manifeste.

Peu importe la teneur de la réforme proposée, sitôt qu’il entend au fond des bois le son du cor annonçant la possible remise en cause de son enseignement, il se jette dessus pour mieux la déchiqueter avec la rage d’un chien dont on viendrait, sans lui avoir demandé son avis, de changer la marque de ses croquettes préférées.

Mardi prochain, ils seront encore des milliers à arpenter le pavé parisien pour demander le retrait du texte de loi de la Ministre.

Ça ne va pas, on va droit dans le mur, c’est une génération entière de lycéens qu’on est en train de sacrifier, on nous prend pour des jambons, on nous demande tout et son contraire, on s’y perd, on ne nous a pas consultés, c’est un coup-bas porté à la profession, on n’est pas assez formés, on a besoin d’une réforme pas d’une avalanche de mesurettes qui se contredisent les unes les autres, la Ministre n’a rien branlé, c’est un foutoir pas possible.

Les professeurs de latin et de grec l’ont mauvaise d’apprendre qu’ils ne sont plus indispensables à la bonne éducation de nos enfants.

C’est un crime contre l’humanité.

C’est Cicéron qui passe pour un vieux con.

C’est Tacite qui n’a plus le droit de cité.

C’est Euripide qu’on lapide.

Les germanistes fulminent contre la Ministre coupable de vouloir ghetthoïser Goethe, battre en brèche Brecht, dégraisser Günter Grass, scier Schiller, dévaliser Novalis.

Et les hommes politiques de leur apporter tout leur soutien, ces eunuques littéraires tout juste bon à crachoter à longueur de discours des phrases borgnes de la moindre joliesse lexicale et qui, d’un coup, en viennent à pleurer sur la disparition plus ou moins fantasmée de ces langues mortes dont hier encore ils ne connaissaient l’existence qu’à travers leurs lectures assidues d’Astérix.

A croire qu’ils s’endorment toutes les nuits en récitant leurs déclinaisons latines et se réveillent en entonnant le chant III de l’Odyssée dans sa version originelle. 

Que nos gouvernants songent à réduire la place du latin et du grec au profit de modules plus en conformité avec le monde qui nous entoure n’a rien de choquant en soi, surtout quand ce monde-là a depuis bien longtemps perdu la bataille de l’esprit sur l’autel de l’entreprise, nouveau veau doré de nos illusions perdues.

On peut parfaitement vivre sans être familier des subtilités du radical du supin, des charmes vénéneux des verbes déponents, de l’inquiétante étrangeté du gérondif ou de la traîtrise perfide du rhotacisme.

Du moment qu’une fois rendu à l’âge adulte on découvre que sans Sophocle, nous serions étrangers à notre propre intelligence, nous regardant évoluer avec la même stupéfaction ahurie et perplexe qu’un singe croisant son visage ahuri et perplexe dans un miroir tendu sous ses yeux ahuris et perplexes.


Et c’est le fils d’un professeur de lettres classiques qui vous le certifie !


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J’ai passé mon test de nationalité…canadienne

 

Hier matin, j’ai été convoqué pour passer mon test de nationalité, la dernière étape avant de devenir un Canadien pur souche capable de bâtir sa cabane en s’enivrant au sirop d’érable.

Vingt questions au programme.

Plus de cinq erreurs et c’était la reconduite à la frontière direct par le premier avion.

Je n’en menais pas large.

Depuis des semaines j’avais bouffé du canadien à haute dose.

L’histoire du pays, sa géographie, le fonctionnement de ses institutions, le rôle de la Reine d’Angleterre à qui bientôt j’aurais à prêter allégeance, la différence de dentition entre le castor et le caribou, la recette de la poutine, la couleur du drapeau, les paroles de l’hymne national, la personne à appeler en cas de constipation, l’espérance de vie d’un ours sauvage, la devise du pays, le nom des capitales provinciales, la façon de démonter son tipi en moins de trois minutes.

A plusieurs reprises je fus sur le point de renoncer.

C’était quoi ces manières de venir m’emmerder avec leurs questions à la noix ? J’avais passé l’âge de bachoter comme un demeuré d’étudiant obligé de retenir des dates dont tout le monde se foutait. Me familiariser avec des personnages historiques tout juste bon à éveiller l’intérêt de marmots en classe de maternelle. Me coltiner le nom de lacs dans lesquels jamais je ne barboterais.

Je n’en dormais plus.

Je révisais et révisais encore au point de tout finir par confondre.

Le matin de l’examen, je tremblais comme si j’avais rendez-vous chez l’ophtalmo pour décider de la date de l’ablation de ma vessie.

Précautionneux comme un amoureux à son premier rencard, j’arrivai une heure à l’avance au rendez-vous.

Il y avait foule.

Des Asiatiques un peu partout.

Quelques Sikhs, un panaché d’Arabisants, une palanquée d’Hindous, une tripotée de Philippins, et moi, moi, moi, quarante-sept balais au compteur, fier et unique représentant de la vieille Europe, le seul à exiger de passer le test en français, au grand désappointement de l’examinateur contraint de descendre à la cave chercher un questionnaire rédigé dans la langue de Marc Lévy.

Évidemment avec mon nom à coucher un Juif dans un wagon plombé, je ne rentrais pas dans les cases et à nouveau j’ai dû me circoncire de quelques consonnes pour ne froisser personne.

Assimile-toi et tais-toi.

On a distribué les tests, je me suis plongé dedans avec l’avidité d’un bûcheron décidé à décimer son tronçon de troncs avant l’heure de la pause, j’ai entouré ce que je pensais être les bonnes réponses ; en me relisant, je me suis aperçu que je m’étais trompé de lignes : par mégarde j’avais affirmé que pisser sur la pelouse du voisin constituait une façon de rendre service à sa communauté, que je devais révéler à mon boulanger pour qui j’avais voté lors des élections fédérales, que la seconde guerre mondiale avait servi à libérer les baleines bleues de l’oppression des grands phoques blancs et que servir la Reine consistait à manger du castor tous les 11 novembre en mémoire de Jacques Cartier qui fut le premier explorateur à ouvrir un casino en Floride.

J’ai attendu les résultats dans une salle attenante qui devait furieusement ressembler au hall de la gare centrale de l’aéroport de Pékin à l’heure de la révolution culturelle.

On a fini par m’appeler, une dame a ânnoné Monsieur Lauri Maoloichen est demandé au comptoir et d’instinct j’ai su qu’elle parlait de moi.

Je me suis présenté, elle m’a dit que j’avais commis une faute, je me suis excusé, elle a fini par me demander si j’étais bien celui que je prétendais être, après réflexion j’ai convenu que oui excepté le jour où belle-maman venait dîner à la maison, elle m’a félicité et m’a annoncé que d’ici trois mois je recevrais ma convocation pour prêter allégeance.

A la Reine d’Angleterre.


Ou à l’Impératrice de Chine.

                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                            Pour suivre l’actualité de ce blog, c’est par ici : https://www.facebook.com/pages/Un-juif-en-cavale-Laurent-Sagalovitsch/373236056096087?skip_nax_wizard=true )

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Mon 10 mai 1981 à moi


Ce mois de mai 1981 fut à bien des égards un mois charnière dans la vie de celui qui allait devenir par la suite le blogueur le plus doué de sa génération, du moins dans la catégorie des demi-chauves ne dépassant pas le mètre soixante-quinze.

Le 10 de ce mois fameux, il connaîtrait le seul orgasme politique de son existence, avant de devenir la semaine suivante un homme à part entière en récitant d’une voix tremblante le charabia d’un texte hébraïque devant une assemblée obligée de se hausser sur les pieds afin d’apercevoir le visage de la demi-portion qui prétendait rejoindre là la communauté de ses ancêtres.

En ce joli mois de mai, j’ai donc treize ans, je suis en quatrième dans un lycée du sud de Paris où je m’ennuie comme une otarie dans son bassin zoologique, je n’ai toujours pas décidé quand je serai grand si je deviendrai le nouveau Rocheteau ou la réincarnation de Björn Borg ; d’ailleurs, grand, je ne suis pas certain de l’être un jour : à cette époque, je dois graviter autour du mètre vingt, crampons compris.

Je commence à lire Libé, je picore dans le Nouvel Observateur, je suis évidement de gauche quand bien même serais-je incapable de dire ce que cela peut bien signifier si ce n’est d’être du bon côté, de celui qui défend envers et contre tous la veuve et l’orphelin, et comme je suis moi-même victime de moqueries répétées au sujet de ma taille lilliputienne, je me sens d’emblée une sympathie pour tous les opprimés de la terre.

Et puis, étant le rejeton d’une mère œuvrant dans le corps professoral, je n’ai guère le choix : tu seras de gauche mon fils ou tu ne seras pas.

Je suis.

Mon père étant belge et fier de l’être, malgré une ressemblance plus que troublante avec Valery Giscard d’Estaing, ce qui nous vaut souvent le regard ahuri d’automobilistes certains d’avoir doublé le monarque qui les gouverne – mon père s’est vu décerné le titre de conducteur le plus lent de l’hexagone depuis l’invention de l’automobile –  me fout une paix royale.

Je suis donc de gauche.

Je ne garde aucun souvenir précis de la campagne électorale.

Je me souviens juste qu’entre les deux tours, un soir où mes parents recevaient des amis catalogués à droite, j’ai dressé une banderole dans le couloir où j’ai écrit, en grosses lettres, Mitterrand Président, mais juste avant le début des agapes, on m’a obligé à la retirer pour ne point froisser la sensibilité des invités déjà assez traumatisés à l’idée de voir l’Armée Rouge débouler bientôt dans leur salon.

J’obtempère, non sans m’écrier que le temps des injustices touche bientôt à sa fin, que la révolution est en marche, qu’avec Mitterrand, le règne des parents despotes sera à jamais révolu.

Le dimanche de l’élection, nous attendons.

Vers 19 heures, le téléphone sonne : une amie dont le cousin de sa tante par alliance fréquente la belle-sœur du petit-fils de Rocard nous annonce que c’est fait, on a gagné, Valéry a fini de rire, le peuple a vaincu, l’heure est à la revanche.

J’ouvre grand la porte de l’appartement et je beugle dans les escaliers, Mitterrand Président, Mitterrand Président.

Je m’en prends une en retour mais je m’en fous, je suis heureux.

A vingt heures, c’est confirmé, les chars de l’Armée Rouge viennent de franchir le Rhin, la tête de François apparaît sur notre téléviseur, on débouche le champagne, c’est historique, c’est historique répète ma mère, je retourne dans les escaliers où de ma voix de poussin je hurle, on a gagné, on a gagné.

Cette fois personne ne me dit rien.

Je demande à ma mère si on ne peut pas aller à Bastille célébrer avec nos camarades de lutte la victoire sur le capitalisme, c’est non, demain j’ai école, et dans une semaine, je suis convoqué à la synagogue pour devenir un homme.

Tant pis, je me rattraperai à la prochaine élection.

Je ne pouvais pas savoir que ce 10 mai serait la seule fois où je goûterais au bonheur sans partage de voir un homme tout aussi obsédé par la mort que par l’injustice accéder aux plus hautes responsabilités.

Depuis, j’ai fini par grandir, pas de beaucoup mais suffisamment pour tenir tête à mon ombre, je n’ai plus jamais foutu les pieds dans une synagogue, du moins de mon plein gré, et j’ai toujours voté à gauche, plus par habitude que par conviction. 


Par contre je n’ai toujours pas décidé qui, de Rocheteau ou de Bö
rg j’allais prendre la succession.


J’ai tout mon temps.


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Discret comme un Juif anglais


Si le vent de l’Éternel veut bien souffler pour une fois dans la bonne direction, les Anglais se réveilleront demain matin avec un Premier Ministre juif à la tête de leur pays, en la personne du très estimé Ed Miliband.

C’est évidemment sans intérêt mais en tant que blogueur sémite appartenant de toute éternité à la tribu des nez crochus, je ne pouvais tout de même pas passer cette information capitale sous le talit.

D’autant plus qu’il est bien difficile de trouver chez le leader du Parti travailliste le moindre indice révélant son appartenance à cette race maudite.

Hormis une vague ressemblance avec Barton Fink, rien ne laisserait penser que cet homme forcément brillant, à l’intelligence ataviquement supérieure, puisse se réclamer d’une quelconque manière d’une lignée remontant à Moïse et Associés, petite entreprise plus ou moins prospère selon les époques, spécialisée dans la victimisation à-tout-va et championne hors catégorie en pogroms, génocides et autres holocaustes plus ou moins inventés.

Il faut le dire : je ne connais pas de Juif plus discret que le Juif anglais.

D’ailleurs, à part le fameux Benjamin Disraeli, je serais bien en peine d’en nommer un autre hormis Shakespeare, Margaret Thatcher, John Lenon, Morrissey et la Reine d’Angleterre, autant de Juifs qui simplement s’ignoraient.

Le terme même de ”Juif anglais” m’apparaît comme une incongruité linguistique, allant même jusqu’à revêtir une incompatibilité métaphysique, un anachronisme de premier ordre, rivalisant en étrangeté avec un Américain cultivé, un Français aimable, un Italien silencieux ou un Chinois hilare. 

J’ai beau chercher, ce Juif prétendument anglais, je ne l’associe à aucune image mentale, à aucun artiste illustre, à aucun personnage digne de figurer dans le panthéon de l’imaginaire juif.

Je vois un peu près à quoi peut ressembler un Juif hongrois, un Juif américain, un Juif français, un Juif allemand, enfin s’il en reste, un Juif tunisien, un Juif argentin, un Juif israélien (le pire de tous) mais un Juif anglais, j’ai beau chercher, à son évocation, rien ne me vient à l’esprit si ce n’est le fantôme d’une Kippa dansant dans un brouillard londonien à couper une brick au thon.

Une page blanche.

D’abord ça bouffe quoi au juste un Juif de sa précieuse Majesté ? Du couscous à la menthe ? Des boulettes à la confiture de prune ? De la carpe farcie pêchée dans la Tamise ? Du pudding au cumin ? Du crumble à la Boukha ? Du Fish and Ships à l’huile d’olive ?

Et la mère juive anglaise, si elle existe, à quoi elle peut bien ressembler, hein ?

Vous l’imaginez un seul instant téléphoner à son fils au milieu de la nuit pour lui dire ” I pray you my son but do you only know that your mother is not yet dead and that you can call her from time to time to give some news about you ” (je t’en prie mon fils est-ce que tu sais seulement que ta mère n’est pas encore morte et que peux l’appeler de temps en temps pour lui donner de tes nouvelles ?) 

Ou se plaindre à son coiffeur de l’égoïsme de son mari, Mark Bitbull (Maurice Boutboul) ?

Ou s’égosiller au téléphone avec son amie Jane Abetrish (Janine Abecassis) au sujet du prochain mariage de la fille Stockton (Shoukroun) avec le fils Borroway (Boujenah) ?

J’ai beau essayer, je n’arrive pas à me la visualiser cette mère juive, recluse dans son manoir anglais de la campagne du Sussex, occupée à siroter du thé avec ses amies de bridge, tout en chargeant la domestique de préparer le couscous.

The Truth if I Lie.

De toute évidence le Juif anglais n’existe pas en tant que tel.

Ou alors c’est un modèle d’assimilation tellement parfait qu’il a gommé toutes les aspérités héritées de ses ancêtres.

Un Juif rêvé en somme.

Qui ne la ramène jamais.

Poli jusqu’au bout de ses Burlington.

S’autorisant à jouer au poker mais arrêtant sa partie à neuf heures du soir pour s’occuper de son lévrier.

Passant ses weekends à tondre sa pelouse au lieu de débouler avec sa BMW dans les rues de Deauville, direction le casino.

Un Juif obséquieux et pluvieux.


A l’image de cet Ed Miliband qui ” je te le donne en mille, Simone, est Juif de chez Juif, sur la tête de mes enfants ma parole c’est vrai, je l’ai lu dans le blog de Sagalovitsch, tu sais le Schnorrer de chez Slate… “

                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                              Pour suivre l’actualité de ce blog, c’est par ici : https://www.facebook.com/pages/Un-juif-en-cavale-Laurent-Sagalovitsch/373236056096087?skip_nax_wizard=true )

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Les Le Pen, propositions pour une sortie de crise


Ils vont nous emmerder encore longtemps les Le Pen avec leurs bisbilles familiales qui n’en finissent pas de finir ?

C’est indécent à force.

Un peu de pudeur que diable, vous qui n’avez eu cesse de vilipender les mœurs barbares de ces étrangers qui viennent souiller de leurs coutumes moyenâgeuses  le sang de la Grande Nation française.

Les affaires de famille se règlent en famille, pas sur la Place la République où chacun à tour de rôle vient geignardiser sur l’ingratitude ou la mesquinerie de l’autre, dans un ballet parfaitement ordonné digne d’une opérette grecque montée pour les soins d’une telenovela mexicaine.

A ce rythme-là, Kate aura encore le temps de se faire engrosser par William, d’accoucher en grandes pompes d’un troisième moutard, de tenir en haleine la planète entière pour connaître le prénom de sa dernière production, qu’on ne connaîtra toujours pas la conclusion de toute cette foireuse dispute dont tout le monde se contrefout éperdument.

Moi le premier.

 S’ils pouvaient seulement finir par s’entre-tuer pour de vrai, je serais le plus heureux des hommes.

Une dispute qui tourne mal, des noms d’oiseaux qu’on s’échange, ”espèce de bougnoule, toi-même Papa”, des coups qui partent, un couteau saisi on-ne-sait comment, une main qui ne répond plus de rien, une poitrine qui passe par là,  un cœur qui agonise, une flaque de sang qui se forme sur laquelle glisse l’auteur du forfait avec comme conséquence un funeste triple salto arrière-réception sur le coin du buffet-  explosion de la boîte crânienne et le tour est joué.

Un accident domestique tout bête, un point de détail dans le bel ordonnancement d’une vie familiale réglée au cordeau : le  fantôme du chat de Marine qui, désœuvré comme un Arabe mort, actionne sans crier gare le mécanisme du four à gaz d’un coup de patte bien ajusté, les deux qui décident de jouer aux dés la Présidence du  Parti, les dés cachés on-ne-sait pourquoi dans le couscoussier de la maisonnée, le soir qui tombe, la nuit, l’obscurité, la lumière de la cuisine qu’il faut se résoudre à allumer, l’étincelle fatale et c’est l’une des familles françaises les plus illustres qui part en fumée.  

Un suicide collectif en forêt de Saint-Cloud sous la forme d’une pendaison qui ne laisse rien au hasard.

Un Philippot victime d’un coup de sang qui soudain pète les plombs, et règle son compte à toute la fratrie à l’aide du revolver ramené par le Pépé de ses conquêtes d’Algérie, avant de se débarrasser des corps à l’arrière d’un entrepôt de boucherie hallal.

Qu’on en finisse.

Peu importe comment.

Ça prétend gouverner un pays, ferrailler avec l’Europe, sécuriser nos frontières et ce n’est même pas fichu de mettre à pied un borgne de vieillard tout juste bon à radoter les mêmes antiennes antisémites dans un journal lu par quelques décérébrés qui pensent encore que la Bataille de Normandie n’est pas encore perdue.

Marine est une couille molle.

En pareil cas d’espèce, dans n’importe quelle autre famille gauloise, ça se termine par ”Papa, on a bien réfléchi mais on ne peut pas continuer de la sorte. Ce n’est plus possible. Ton berger allemand que tu oublies de sortir, tes réveils à l’aube quand tu gueules comme un dératé pour assister au lever des couleurs, et maintenant la bonne que tu confonds avec Marion, on n’en peut plus, Louis et moi. Non le mieux pour tous, on a bien réfléchi Papa, c’est la maison de retraite ”. 


Et c’est sur la route qui les menait dans les Alpes bavaroises, direction l’établissement où le patriarche déchu devait passer le reste de ses jours, qu’un Rom à bord d’une Mercedes volée percuta de plein fouet, en essayant d’éviter un Erythréen de souche en route vers Hambourg,  la berline nationale, et l’envoya valdinguer dans un ravin transformé en tragique linceul.

                                                                                                                                                                                                                                                                                                             Pour suivre l’actualité de ce blog, c’est par ici : https://www.facebook.com/pages/Un-juif-en-cavale-Laurent-Sagalovitsch/373236056096087?skip_nax_wizard=true )

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