Mais qui c’est ce Gerhard Schröder à la fin ?

 

Schröder par-ci, Schröder par-là, Schröder a fait ceci, Schröder a accompli cela, Schröder n’a pas hésité à…Schröder a eu le courage de… Où est notre Schröder à nous ?… Qui pour oser ce que Schroeder a osé entreprendre ?…Il nous faudrait un Schröder… C’est du Schröder dans le texte… Il reprend les mêmes idées que Schröder…

Schröder, Schröder, Schröder !!!

Pas un jour ne se passe sans que d’une manière ou d’une autre nos gouvernants, nos opposants, nos commentateurs ne fassent référence à cet auguste personnage auquel ils n’en finissent pas de tresser des lauriers, de déposer à ses pieds des gerbes de compliments, de dresser de lui un portrait si flatteur qu’il finit par apparaître comme un de ces redresseurs de torts des temps anciens dont l’aura continue à se perpétuer à travers la brume des siècles.

Un surhomme capable de changer à lui seul le destin d’une nation.

Un homme providentiel, paré d’une intelligence si fine, doté d’un courage si grand, pourvu d’un sens de l’intérêt général si développé qu’il mériterait qu’on rajoute un nouveau chapitre à la Bible afin que ses exploits à répétition viennent concurrencer ceux de Samson ou de David.

L’homme qui a permis à l’Allemagne de redevenir ce phare qui nous guide dans la nuit incertaine de la Grande Histoire.

Personnellement, le Gerhard je ne le connais pas bien.

Voire pas du tout.

Il est vrai que j’ai toujours eu quelque mal à m’intéresser aux affaires germaniques, que la seule évocation du vocable  ” allemand ” provoque en moi des crises de tachycardie si violentes qu’elles m’obligent à prendre des douches glacées pour les calmer, que Jankelevitchien dans l’âme, il peut m’arriver de penser que décidément on se sera montré d’une clémence extrême vis-à-vis de cette nation coupable pourtant de la sortie de route la plus tonitruante de l’histoire de l’humanité.

Mais passons.

Puisqu’il paraît qu’il faut tourner la page, revenons donc à nos Schroeder.

A cet homme qui parvient à s’attirer les louanges de la droite et de la gauche réunies dans la même béate admiration, à ce totem autour duquel s’agglutine toute la classe politique s’offrant des orgasmes à répétition à son seul nom évoqué, soupirant de ne pas posséder parmi son troupeau un taureau aussi férocement volontaire dans son souci de réformer l’Etat fût-ce au prix d’une popularité en berne.

Entre ici Gerhard, toi Chevalier sans peur et sans reproche, Don Quichotte des temps modernes, Che Guevara du nouveau siècle, Moïse de l’économie allemande, Pharaon de la construction européenne, Hercule des marchés financiers, César du redressement national, Napoléon de la lutte contre les déficits, Attila de la réforme, Tarass Boulba de la politique de l’offre, Goldorak du volontarisme, Dieu Tout-Puissant de l’effacement de la dette.

Puissions-nous, nous autres simples franchouillards mous du béret et hérauts de la prudence, s’inspirer du sillon que naguère tu traças dans le fracas d’une économie déboussolée et à laquelle tu fis don de ton corps et de ton âme, n’hésitant pas à sacrifier ton ambition personnelle au nom de l’intérêt supérieur de ta patrie en danger.

Puissions-nous puiser dans ton exemple la force de redresser notre pays de veaux, lui assener une claque si forte qu’il finisse par sortir de sa torpeur immémoriale où des politiques trop avenantes l’ont plongé, l’amener enfin à se regarder en face et contempler la force de son immobilisme, cette aspiration à rester encrouté dans de vieilles certitudes inébranlables.

A défendre coûte que coûte des privilèges acquis en des temps plus favorables, à se dresser sur ses ergots dès lors qu’il s’agit de procéder à des changements pourtant indispensables s’il veut se sortir de cette inertie dans laquelle il se complaît depuis trop longtemps maintenant, l’empêchant de s’extirper de cette dépression moisie où il se morfond avec une délectation souffreteuse, à la recherche d’un glorieux passé qui ne reviendra plus.

 

Levez-vous vite Gerhard désiré qui devez emmener la France dans les espaces d’une autre vie !

 

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J’ai refusé le Ministère de la Culture

 

Au milieu de la nuit le téléphone a sonné.

J’ai bondi hors de mon lit, envoyant valdinguer dans les airs mon chat endormi sur mon flanc, j’ai cavalé jusqu’au salon, je me suis mangé le lampadaire du couloir, j’ai manqué de m’étrangler avec une liane du ficus, j’ai fini par trouver le combiné caché sous ma réserve de valium.

J’ai décroché.

C’était le directeur de cabinet de Manuel Valls.

Je m’en doutais.

Depuis que j’avais appris la nouvelle de la démission du gouvernement, je pressentais ce coup de fil, je savais que je figurais en bonne place sur la short-list du premier ministre, il me l’avait confié en personne lors d’un tête-à-tête impromptu à la fête de la musique, “la prochaine fois, tu en seras, la France ne peut pas se passer de toi”, je l’avais cru ; il n’était pas homme à ne point tenir ses promesses.

Quel Ministère ? j’ai demandé. La Culture. La quoi ? La Culture. Je voulais l’Économie. Déjà pris. Par qui ? Macron. Lui ? Oui. Pourquoi ? Il a le profil. Et moi pas ? Non. Tu es trop pro-israélien. Qui a dit ça ? Manuel. La Justice ? Impossible. Taubira reste. Elle reste ? Oui. La Culture alors, c’est ça ? Oui. Je dois réfléchir. T’as dix minutes. C’est tout ? Oui. On doit l’annoncer avant le 20 heures. Je vois.

J’ai raccroché.

Je suis allé me servir un grand verre d’eau.

Le chat est venu se frotter à moi. Je l’ai balancé dans le frigo pour avoir la paix et j’ai refermé la porte. Il n’a pas moufté. Il avait l’habitude.

Je me suis posté devant la fenêtre.

La Culture.

Cocktails. Discours d’inauguration de la bibliothèque Katherine Pancol à Trifouillis-les-Oies. Remise de médaille à des écrivains obscurs, à des chanteurs oubliés, à des metteurs en scène cafardeux. Les Césars. Les Molières. Le Festival de Cannes. Les poignées de main à des demi-portions d’artistes amoureux de leur ombre. Les ballets. La danse. L’opéra. Les intermittents. Des pinces-fesses avec des attachés culturels guatémaltèques ou bulgares. Des négociations impossibles avec des escrocs googliens ou amazoniens. L’horreur.

Et Macaron qui filait à l’Économie. Impensable.

C’aurait dû être moi.

J’avais le profil parfait.

Me situant à la gauche de la droite du parti mais point trop excentré de son centre, à l’extrémité nord de la face sud du courant réformiste, tout juste à mi-chemin entre la tendance sociale-libérale et sa composante sociale-démocrate, partisan de la relance par la politique de l’offre tout en demeurant un adepte de cette même relance par l’augmentation du pouvoir d’achat, ancien maoïste en culotte courte mais désormais voué à la cause du grand capital, ami fraternel des banquiers mais resté en bons termes avec mes camarades syndiqués de l’école communale, j’aurais pu rassembler sous mes couleurs tout le spectre de la gauche gouvernementale et ornementale.

Bref, j’étais le candidat idéal.

Je pratiquais aussi bien la fronde que la tonte.

En tant que membre éminent de la communauté juive, j’avais mes entrées dans tous les conseils d’administration des plus grands instituts financiers de la planète ; avec un peu chance, j’aurais pu les convaincre d’investir dans des start-up installées du côté d’Auxerre ou de Clermont-Ferrand, relancer la production de l’houmous hexagonal, soutenir l’activité d’industries versées dans le recyclage de roquettes artisanales.

Et puis surtout je n’entendais rien mais absolument rien à l’économie, ce qui devait, en toute logique, me valoir la sympathie de Bruxelles.

Et voilà qu’on me proposait la Culture.

Quelle drôle d’idée avait eu Manuel.

Quitte à me refiler un strapontin d’honneur, j’aurais préféré celui des Anciens Combattants.

Un pèlerinage une fois l’an en Normandie, un autre dans la Somme et le reste du temps, la rédaction de lettres de condoléances à des familles venant de perdre leur vétéran.

Le téléphone a sonné à nouveau.

Je n’ai même pas pris la peine de répondre.

J’avais d’autres chats à fouetter que de m’occuper du déclin culturel de la France. De toutes les manières, il était inexorable. Autant mettre Jean-Pierre Foucault à ma place.

Du coup, je suis allé sortir le mien (de chat).

Il avait bouffé la moitié du reste de mon houmous.

 

Alors que je me faufilais sous les draps, ma femme m’a demandé qui c’était.

Personne. Juste un zozo qui voulait me refourguer des macarons de droite.

 

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Arnaud Montebourg, le Joe Dassin du Parti Socialiste

 

C’est un véritable séisme, une claque monumentale que vient de recevoir en pleine poire notre bon Président de la République dont on ne sait s’il se relèvera d’un tel désaveu : Laurent Ruquier, la conscience du peuple de gauche, le maître à penser de la refondation du socialisme, se dit atrocement déçu par sa mandature et regrette même d’avoir voté pour lui.

Le coup est sévère.

Nul ne peut prédire à cette heure la portée d’un tel sermon, si ce n’est qu’il s’inscrit d’ores et déjà dans la droite lignée de ces déclarations charnières qui ont marqué de leur empreinte l’histoire de la Cinquième République, de ces dates clés dont plus tard les collégiens se souviendront à l’heure d’étudier les grands mouvements de la société française en ce début de siècle.

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Comparée à cette cinglante mise en demeure, les rodomontades acérées de nos Quick et Flupke de la politique hexagonale, j’ai nommé Arnaud Del Dongo accompagné de son fidèle lieutenant Benoit Sancho, réunis en conclave dans la champêtre localité de Frangy-en-Bresse, ne pèsent pas bien lourd.

Pourtant, Dieu sait qu’ils portaient beau nos deux ministres dans cette fête de la Rose qui ressemblait étrangement à ces comices agricoles du siècle dernier, si délicieusement et vertement décrites par Flaubert dans Madame Bovary, quand toute la fine fleur d’un département se retrouvait réunie au beau milieu d’un champ à écouter les savants discours de leurs élus revenus le temps d’une fin de semaine de leurs hautes assemblées.

Les tenues sont légères, les chemises blanches et retroussées, le soleil est de la partie, les arbres papillonnent de bonheur, les rires des convives attablés autour des grandes tables sont joyeux et comme le vin servi vous monte à la tête, voilà que sans crier gare, du haut de l’estrade d’où vous dominez toute l’assistance, vous vous surprenez à claironner votre opposition à un gouvernement auquel pourtant il semblerait que vous appartenez.

Mais qu’importe.

L’ivresse est dans l’air, l’humeur à la fête, les cœurs primesautiers et voilà que devant une foule conquise, vous soupirez votre dépit de voir la gauche filer à droite, emprunter des sentiers contraires aux aspirations de ce peuple de gauche que vous vous targuez de représenter et d’incarner à travers la figure de celui qui, rompant le consensus général, ose prétendre, sacrilège ultime, que le salut de la nation passera par une relance de la consommation.

La foule chavire, les roses claquent au vent et vous encouragent à aller encore plus loin, vous déboutonnez un nouveau bouton de votre chemise, c’est votre heure, votre moment, les mots coulent dans votre bouche, vous êtes beau, vous êtes fort, rien ne peut vous résister, vous ne vous retenez plus, vous attaquez à tout-va, vous dégosillez votre désapprobation envers cette politique économique qui étrangle peu à peu le pays, vous fustigez tous ces serviles exécutants allant prendre leurs ordres à Berlin.

Encore un peu plus et vous serez capable de réclamer la démission de ce ministre de l’Économie qui, du haut de sa citadelle bercyçoise, aveugle à la souffrance du peuple, sourd à l’étranglement des classes populaires, indifférent à la désespérance de la petite-bourgeoise, mène la France au désastre.

Mais oui qu’il s’en aille ce j’en foutre au sourire écarlate.

Qu’il parte donc ce troubadour de la politique, ce Joe Dassin du Parti Socialiste, cette girouette incontrôlable qui depuis ses débuts dans les affaires publiques a tellement changé d’avis et de camp, a si souvent retourné sa veste, qu’on finit par se demander s’il ne consulte pas son horoscope avant d’émettre une quelconque opinion.

Qu’il parte donc ce Chevalier à la Rose, on le regrettera pas.

 

De toutes les façons sa reconversion est toute trouvée : à partir d’aujourd’hui Laurent Ruquier, l’homme qui donne des sueurs froides à François Hollande, reprend les Grosses Têtes.

 

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Internet ou les nouveaux intellectuels

 

Et soudain l’autre jour, ce devait être mardi ou mercredi, j’ai eu cette révélation que si aujourd’hui Emile Zola publiait son J’accuse, si Camus nous disait son sentiment sur des guerres proches ou lointaines, ils recevraient en retour une bordée d’injures venues de cette masse de charmants anonymes qui inondent de leurs commentaires fétides les pages des journaux mises à leur disposition.

De ceux qui, à l’aide de leur compte Facebook, peuvent tout à leur aise répandre la substantifique moelle de leur pensée atrophiée, interpeler du haut de leurs savoirs microscopiques et de leur langue exsangue, des historiens, des écrivains, des philosophes, des journalistes coupables d’avoir donné leur avis sur un quelconque sujet d’actualité.

A l’heure d’Internet, tout le monde désormais s’imagine un destin de grand intellectuel.

N’importe quel clampin à même d’éjaculer deux phrases écrites dans un français de bouillabaisse vient en tout bien tout honneur déposer son étron au bas d’un article, et tout content de ses basses œuvres, humant la bonne odeur de son savoir ainsi étalé, se repaît d’avoir dit ses quatre vérités au rédacteur d’un article ou d’une tribune qu’il a à peine lu et encore moins compris.

C’est qu’Internet a tout brouillé.

Autrefois le lecteur de France Dimanche lisait tranquillement son torchon sans embêter personne, sans se douter un seul instant qu’il puisse exister en ce bas-monde une presse capable de s’intéresser à autre chose qu’aux hémorroïdes supposées de Lady Di ou aux amours clandestins d’une chanteuse avec son majordome.

Egaré dans le brouillard de sa propre incontinence mentale, il cavalait solitaire sur les champs arides de sa parfaite et sublime insignifiance délimités par un périmètre bordé par la Roue de la Fortune, le tirage du loto, la centième rediffusion des Sous-doués passent le bac, la retransmission épisodique d’un match de l’Equipe de France et la grande finale d’Intervilles.

Il ignorait qu’un autre monde pouvait exister.

Aujourd’hui ce même ahuri, ce même pétomane, ce même unijambiste de l’intellect, grâce à la gratuité offerte par l’internet, peut en toute tranquillité lire par exemple une tribune de Robert Badinter et se fendre d’un commentaire aussi perspicace que ” Sérieux c est histoire d anti semitisme commence a gonffler, perso chui française, agnostique, mais ce que font les israéliens est insupportable “.

(Je n’aborde pas ici le fond du sujet, c’est encore une autre histoire.)

Ou bien : ” Les vrais musulmans ne sont pas antisemistes car croient en Moïse et en tous les prophètes ils sont plutôt anti sionistes qui sont eux mêmes anti judaïsme ”

Hein ?

Alors certes j’entends bien que, puisque le suffrage universel existe, tout le monde a le droit à la parole.

Qu’après tout on pourrait se réjouir que désormais les frontières aient volé en éclats, que la lecture du Monde ne soit plus réservée à l’élite intellectuelle de ce pays, que quiconque possédant un ordinateur, puisse intervenir et donner son avis au sujet des grandes questions travaillant la société française.

Qu’on n’assiste là à la dernière étape de la démocratisation du savoir.

Ce serait seulement oublier le tonneau d’insultes, d’injures et de menaces qui accompagnent ces commentaires célestes. ” Il devient gaga le papi anti peine de mort.”

Toute cette haine diffuse qui se répand désormais au détour de n’importe quel papier, ce dégueulis immonde du racisme ordinaire, cette façon d’exprimer au grand jour l’expression de son éternel ressentiment, cette affolante propension à dénigrer l’autre sans l’ombre d’un début de raisonnement, cette capacité à cracher son venin sans jamais se remettre en question, cette appétence à tenir des propos si inconsistants qu’ils sont à peine compréhensibles.

Pas l’ombre d’une réflexion mais juste une diarrhée verbale ânonnée par des esprits manchots capables par exemple dès qu’un essaysite tente un rapprochement avec la période nazie afin d’expliquer la montée d’un parti politique de caqueter comme des perroquets borgnes ” Point Godwin! Point Godwin ! Point Godwin “, alors que leur connaissance de la seconde guerre mondiale doit se résumer à la prestation de Bourvil dans La Grande Vadrouille.

 

Bien sûr le plus simple serait de ne pas les lire.

Ce serait pourtant se priver d’une radiographie d’une certaine France encline à chercher ailleurs les raisons de son déclin et manquer à son devoir de vigie quand insensiblement une partie de plus en plus conséquente de la societé s’enfonce dans les sables mouvants d’un nationalisme fourbissant ses armes à l’ombre de la République.

 

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Riche et con à la fois

 

Décidément l’argent rend sublimement idiot.

Et quand de surcroît la richesse s’accoquine avec un soupçon de célébrité, elle provoque alors des tsunamis de bêtise bien grasse qui dégoulinent jusque dans les caniveaux de l’obscénité.

Ainsi donc, pour une cause évidemment tout à fait noble et respectable, en l’occurrence la lutte contre la maladie de Charcot, des grands carnassiers de la nouvelle économie, bientôt rejoints par des trépanés de la musique ou du sport, se sont laissé asperger la figure d’un seau d’eau glacée avant de s’empresser de diffuser sur les réseaux sociaux la vidéo de leur aquatique exploit.

Tout en se fendant d’un chèque qu’on espère substantiel à un organisme chargé de la lutte contre cette maladie.

Quelle largesse de cœur et d’esprit de la part de ces esprits bénis des dieux, s’extasiera le couillon de service en se paluchant les rétines devant le journal de 20 heures.

Reste que l’on éprouve quelque difficulté à comprendre pourquoi a-t-il fallu attendre l’apparition providentielle d’un seau d’eau et du défi l’accompagnant pour que ces messieurs dames de la haute célébrité, entre deux créations de start-up et trois rachats d’entreprises prometteuses, daignent débourser quelques-uns de leurs précieux dollars.

Après tout il me semble exister encore des virements bancaires qui ne nécessitent rien d’autre à leur bon fonctionnement qu’un compte à créditer et un autre à débiter.

Certes, il est bien difficile, au beau milieu de l’été, de résister à l’appel d’un seau d’eau, surtout lorsqu’il s’agit de relever un défi lancé par une personnalité aussi brillante et sémillante que Monsieur Zuckerberg, l’homme qui a permis à l’humanité de connaître la marque préférée du shampoing du neveu de ma tante.

Certes, on comprend tout à fait qu’il eut été des plus inconvenants de se démarquer de ses camarades de promotion en boudant cette joyeuse initiative tout en envoyant, dans l’anonymat le plus total, une somme rondelette au-dit institut.

C’eût été d’une grossièreté sans nom.

Il est des comportements qui ne se font pas entre des gens de même rang.

Car dans cet âge d’or de l’humanité auquel nous assistons et parfois même participons, il nous faut non seulement secourir la veuve et l’orphelin mais aussi mais surtout que le monde entier soit au courant de nos bonnes actions.

Montrer au cul de notre bonne vieille planète l’étendue de notre drôlerie, la modestie de nos coutumes, la générosité de nos agissements.

Voyez donc à quoi nous sommes prêts à consentir afin d’aider notre prochain.

Rien n’est jamais assez quand il s’agit de venir en aide à des malheureux qui n’ont pas connu notre fortune.

Nous sommes prêts à toutes les extravagances pour rendre ce monde un peu meilleur : sauter en élastique, se payer un repas sans vin, passer une nuit à la belle étoile, enfiler un kilt, sodomiser une mouche, laver sa voiture, avaler une cuillerée de moutarde ordinaire, péter dans la soie, sortir ses poubelles, tondre sa pelouse, baiser sa femme de chambre, tapoter le crâne d’un asthmatique.

C’est si drôle et en même temps tellement utile, hélas.

Nous sommes de la race des philanthropes, de ceux qui pensent à l’intérêt général avant la satisfaction de nos propres désirs.

Ne croyez pas ce que disent les mauvaises langues et les esprits aigris de jalousie : au fond de nos palais, à l’arrière-cour de nos villas, dans le grenier de nos châteaux, à l’ombre de nos bateaux, continue à battre le cœur d’un homme qui sait la valeur des choses, la douleur de vivre, la cruauté de l’existence.

Nous sommes à vos côtés, ô frères humains.

Et nous le démontrons en diffusant ces vidéos qui nous montrent sous un jour si commun.

Car qu’est-ce donc qui différencie un milliardaire d’un pauvre gueux lorsqu’il se retrouve à recevoir l’offrande d’un seau d’eau glacée ? Rien, absolument rien.

Devant un seau d’eau glacée, nous sommes tous égaux.

Le plus étonnant dans toute cette tartufferie c’est que l’institut en question prétend avoir reçu, grâce à ses généreux bienfaiteurs, 5 millions de dollars.

Considérant leurs revenus, cela apparaît au final bien peu.

Il arrivera un jour où, lors d’un sommet du G20, un président d’une quelconque république défiera ses collègues de se mettre une plume dans le cul devant les télévisions du monde entier pour dire sa solidarité aux déshérités de la planète et lutter contre la faim dans le monde.

Et nos gouvernants, l’un après l’autre, n’auront d’autre choix que de venir se défroquer au balcon de nos téléviseurs.

 

Rassurez-vous, là aussi ce sera pour la bonne cause.

 

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Robin Williams ne s’est pas suicidé, il a juste devancé sa mort

 

Vivre ne va jamais de soi.

Le suicide de Robin Williams est encore là pour nous le rappeler.

Il nous faut à chaque matin recommencé nous convaincre de la nécessité de se lever, de trouver en soi les forces suffisantes pour affronter une nouvelle journée, de taire ces écœurements qui nous murmurent de leur refrain morbide la vanité des choses, la mesquinerie des hommes, la veulerie des femmes.

Jusqu’au jour où l’on décrète que le jeu n’en vaut plus la chandelle.

Que cette vie que nous avons patiemment construite nous apparaît sous un jour tellement blafard qu’il vaut mieux tirer sa révérence au lieu de continuer à mener une existence où chaque heure s’apparente à un chemin de croix, chaque minute à un calvaire ininterrompu, chaque seconde à une torture mentale que rien ne parvient à apaiser.

Ni l’alcool, ni les drogues, ni l’amour des siens, ni l’orchestration de notre vie domestique, ni le semblant de sécurité que nous apportait jusque-là notre travail routinier, ne pèsent face à ce sentiment de l’irrémédiable inanité de notre existence, de toute existence.

Je ne sais pas ce qui a conduit Robin Williams à mettre fin à ses jours.

Personne ne le saura jamais vraiment.

Il se peut que lui-même ne l’ait pas vraiment su.

Il avait juste acquis la certitude que cette fois la fête était vraiment finie, que l’avenir ne lui réservait plus qu’une litanie de jours désespérants de monotonie blême, si prévisibles dans leur implacable mastication qu’il fallait mieux achever là la comédie de sa propre vie.

Il était dépressif comme nous l’avons tous été un jour ou l’autre.

De cette dépression qui embastille l’âme dans une prison si cadenassée de partout qu’elle ne parvient même plus à entrevoir la possibilité de retrouver un jour le doux chemin de l’espoir et de la lumière.

La force tellurique du désespoir qui nous anéantit, nous broie, nous écrase, ne nous laisse aucun moment de répit, nous emmène au bord du précipice où miroite enfin la possibilité d’échapper à toute cette souffrance en se fiançant avec cette mort qui nous sourit de toutes ses dents et nous invite à la rejoindre.

Nous sommes tous des suicidés en puissance.

Qui n’a jamais songé, suite à un chagrin d’amour, à une contrariété de trop, à un deuil impromptu, à franchir cette mince et si fragile frontière qui sépare la vie de la mort, à enjamber cette passerelle et à s’enfoncer à tout jamais dans la grande nuit de l’infinie solitude ?

La pensée que plus jamais aucune joie ne viendra nous visiter, que nous sommes condamnés à vivre une vie si terne, si triste et si convenue que par avance elle nous dégoûte, que nous refusons d’être complices de ce simulacre où il nous faudra continuer à donner le change alors que hurle en nous l’envie d’en finir avec une existence qui ne nous concerne plus.

Naît alors dans les marécages de notre âme désolée l’idée que seule la mort saura redonner un sens à notre vie.

Et quand cette idée devient une obsession, qu’elle ne cesse de jour comme de nuit de ricaner de nos efforts entrepris pour lui échapper, qu’elle revient sans cesse à la charge et nous houspille sans relâche, il arrive parfois que les digues sautent et avec elles le fil ténu qui nous rattachait à la vie.

 

Le suicide n’est qu’une mort anticipée.

Une invitation qu’on devance et à laquelle on ne peut se soustraire.

Et un ultime bras d’honneur lancé à la face d’un monde qui a fini de ne nous intéresser.

 

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Serais-je atteint de transphobie ?

 

J’avoue au risque de passer pour un affreux réactionnaire, j’ai un peu de mal avec les personnes dites transgenres, terme générique qui englobe, à ce que j’ai pu comprendre, une infinité de possibilités allant du transsexuel à l’androgyne.

Dire qu’elles m’intriguent est peu dire.

J’ai beau essayer de domestiquer mon cerveau, le câliner dans tous sens, le supplier de se dégourdir ses neurones, je n’arrive toujours pas à concevoir qu’on ne puisse être ni femme ni homme mais autre.

Tout simplement autre.

Comme si on venait de lancer sur le marché un produit révolutionnaire prêt à conquérir de nouvelles parts de marché mais qui ne trouverait sa place sur aucun rayon existant.

Et puis sitôt que j’essaye de m’informer un tant soit peu sur le sujet, je me perds dans une nébuleuse d’informations si étourdissante à consulter que je dois m’inspecter le bas-ventre pour m’assurer que je suis toujours celui que je crois être.

Entre la personne qui se sent femme dans un corps d’homme ou inversement mais qui conserve ses attributs féminins, celle qui au contraire opère un changement radical de sexe, celle qui continue à jouer sur les deux tableaux, celle qui se réclame d’une identité encore à inventer, je barbotte dans un océan de confusion.

Et évidemment, intérieurement, je ricane comme un imbécile quand il m’arrive d’en croiser une et que, malgré mes regards détournés mais appuyés s’attardant sur les moindres détails de son anatomie, je me retrouve dans l’impossibilité quasi métaphysique de dire si je viens de croiser le fantôme de l’opéra ou la cantatrice chauve.

De ce rire gras, épais, idiot de l’analphabète qui, plein d’une ignorance crasse, confronté à une situation qui le dépasse, déstabilisé par l’apparition d’un objet dont il ne saisit ni l’essence ni la raison d’être, préfère en ricaner que de se remettre en question.

Le ricanement bête de l’amateur de peinture qui, pris de court par l’émergence d’un nouveau courant artistique venant chambouler l’ordre établi, ne sait que se gausser, incapable qu’il demeure de se remettre en question, englué dans ses certitudes d’un autre siècle, inapte au changement ou à la modernité.

Au Canada, il est désormais sérieusement question de généraliser la création d’un nouvel espace dans les toilettes publiques : un endroit pour les hommes, un autre pour les femmes et un troisième pour les transgenres.

Ah.

Appliquant mes vieux réflexes de mâle mal dégrossi, voilà que je me perds dans des raisonnements si tarabiscotés que rendus publics ils pourraient me valoir la castration par pendaison des testicules sur la place de l’hôtel de ville.

Je n’en dirai donc rien mais je ne peux m’empêcher de penser que ce monde va un peu trop vite pour ma pauvre personne même si, rimbaldien dans l’âme, je conçois qu’il faut être absolument moderne.

Après tout, aux toilettes, il ne s’agit que de se séparer de quelques centilitres superflus d’un liquide qui, atteint d’une crise de claustrophobie dans le confinement d’une vessie devenue trop étroite pour le contenir, réclame à cor et à cri un bon de sortie.

Ce n’est pas comme si, pénétrant dans ces lieux insalubres, on exigeait du nouvel arrivant de se livrer à un numéro d’acrobatie onaniste.

Il paraît pourtant que c’est une question d’intimité.

Que ces personnes à l’identité indécise se sentiraient agressées par le regard de l’autre, ce malotru qui, considérant la présence même de cet individu en ces lieux propices à l’introspection urinaire, l’amènerait à l’adopter comme un compagnon de bidet alors que non.

Que tout au contraire, cette personne ne se reconnaissant ni homme ni femme mais d’une identité que je ne saurais définir avec exactitude, voudrait que la société accepte son appartenance à un nouveau genre, disposant de droits propres à sa condition, et partant, réclamant en toute logique des lieux d’aisance destinés à elle-seule.

Rien que de l’écrire j’en ai comme le vertige même si je comprends tout à fait la raison et la pertinence de cette démarche.

Sauf que quand contraint et forcé je me retrouve à hanter ces sanitaires collectifs, je suis tout à ma tâche consistant à me débarrasser à tout prix des dernières gouttes récalcitrantes à s’émanciper de leur mère patrie, et partant, tout à fait indifférent au sort de mon voisin.

 

Décidement, il n’y a rien de meilleur que de pisser contre un arbre.

 

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Juifs de France, venez immigrer au Canada

 

Le Juif de France doute.

Dans sa traversée de Paris, il lui arrive parfois, au détour d’une manifestation, simple rassemblement de pacifistes en grenades courtes, d’entendre de gentils et somme toute innocents quolibets appelant à sa disparition prochaine.

Pour se rendre à sa synagogue de quartier, il doit se travestir en drag queen afin de ne pas susciter la désapprobation de passants scandalisés qu’on puisse encore se balader dans les rues de la capitale avec une kippa sur le crâne pour cacher sa calvitie naissante.

Sur les réseaux sociaux, des jeunes gens désœuvrés, entre le visionnage de deux films de cul et un match du PSG, jouent à ” Dieudonné a dit ” et prennent le temps, en des termes circonstanciés, de confier leur haine tranquille du juif que, du haut de leur savoir encyclopédique, ils jugent tout à la fois victimaire, complotiste, esclavagiste, ennemi du genre humain, responsable du désordre ambiant et coupable de la déréliction du pays.

Et avec la résurgence du conflit israélo-palestinien, voilà qu’on l’associe désormais à un être sanguinaire attendant de recevoir par la poste sa – excusez-moi un instant d’interrompre ici ma logorrhée  (et je n’invente rien !!!!!!) mais je viens de recevoir à la seconde même un charmant commentaire au sujet d’un de mes derniers papiers : “Les juifs sentent la puanteur, la nausée et l’odeur de la putréfaction, parce qu’ils sont maudits et bannis des européens et n’ont trouvé refuge qu’en Palestine. Et voilà ce qu’ils font ces déchets d’Hitler, ces gazés, ces singes et cochons élus de Dieu. Les européens les soutiennent parce qu’ils se sont débarrassé d’eux et les ont rejetés en dehors de la civilisation ces sauvages. Speculateurs, qui vénèrent l’argent même s’ils tuent leurs mères, ces batards qui ne reculent devant rien.”

Merci Zioua2004 pour ce chaleureux message, même si je me permets d’apporter une petite précision : nous ne tuons pas nos mères, c’est elles qui nous mangent. Crus. Avec une pointe d’Harissa.

Je disais donc que le Juif de France, pour des raisons qu’on ne s’explique pas, mais alors vraiment pas, se demande parfois si après tout il ne serait pas bon de ressortir les valises du placard histoire de voir si le couscous n’est pas meilleur ailleurs.

Comme en Israël par exemple.

Il est de mon devoir de le mettre en garde.

Israël n’est pas ce pays de lait et de miel qu’il prétend être.

Ce serait plutôt une contrée sauvage où l’on vous force à bouffer du houmous au petit-déjeuner, où sous des températures caniculaires, des jeunes filles nubiles se promènent au bord de l’eau en manteau de fourrure, où sur des plages tout sauf abandonnées, d’abominables sépharades trimballant des étoiles de David de la taille d’un pamplemousse passent leurs journées à hurler des plaisanteries douteuses.

Où les automobilistes confondent encore leur klaxon avec leur auto-radio, et où grouillent un si grand nombre de juifs que vous finirez bien vite par éprouver des envies de pogrom.

Bref, un pays à éviter.

Aussi je ne saurais trop vous conseiller de choisir comme destination à votre exil temporaire ou permanent ce Canada de cocagne où personne n’aura l’idée de remettre en cause votre identité de bâtard de juif.

Une destination de rêve, avec à sa tête un premier ministre tellement pro-israélien qu’on se demande si un beau jour il ne va pas décréter Hava Nagila comme nouvel hymne national, et troquer le légendaire sirop d’érable contre une louchée de Hamas heu de Houmous voulais-je dire.

Position qui fort heureusement n’est pas partagée par tout le monde, laissant à prouver que décidément l’idée d’un possible paradis terrestre n’est qu’une supercherie. Une de plus.

Un pays apaisé, ouvert, tolérant, où (pour l’instant) personne n’a encore eu l’étrange idée de sécuriser à outrance des synagogues et où, pendant toute la durée de Hanoukka, une immense mézouzah fleurit au beau milieu du centre-ville, où vous pourriez vous balader coiffé d’un Schtreimel sans que personne ne s’en émeuve, un pays assez sûr de ses valeurs communes pour que cohabitent en toute intelligence une mosaïque de communautés venues des quatre coins de la planète.

Un pays où même un mécréant comme moi, agnostique et divorcé de Dieu, misanthrope et atrabilaire, arrive à ne pas haïr complètement son prochain.

 

Un pays un peu à part où, s’il existe sûrement des Zioua2004, ils doivent à cette heure réclamer à l’Ambassade de France l’asile politique afin de rejoindre leurs frères de combat.

 

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Ca suffit des selfies !

 

Ainsi donc, en ce début de XXIème siècle triomphant, les historiens se souviendront avec émotion qu’apparut dans ses primes années, faisant suite au dadaïsme, au surréalisme et à l’existentialisme un nouveau courant de pensée philosophique intitulé le selfisme.

Lequel consistait à se prendre en photo à l’aide de son téléphone dit intelligent mais tout aussi encrassé de bêtise que son nigaud de propriétaire, puis une fois le cliché réalisé, de l’envoyer dans la seconde à la terre entière afin qu’elle puisse commenter et admirer la performance artistique du photographe enamouré de sa propre personne.

La plupart du temps ladite photo montrait un hurluberlu certifié et approuvé conformément couillon selon toutes les conventions internationales existantes, occupé à mirer dans l’œil de sa caméra le champ infini de son immémoriale crétinerie, en tâchant d’exprimer de la manière la plus éloquente qui soit son étonnement de découvrir sur l’écran de son téléphone l’expression même de son étonnement.

photo

Mise en abyme vertigineuse où se reflétait toute la puissance intellectuelle de l’époque, versée dans une quête de l’absolu rarement entrevue dans l’histoire de l’humanité, magnifiée à travers l’apparition de ces selfies dont s’enticha à une vitesse sidérante la quasi-totalité de la population mondiale.

Aussitôt le mouvement lancé, on ne compta plus ceux qui, au beau milieu d’une manifestation sportive, artistique ou festive (concert, feu d’artifice, rencontre de football, anniversaire de Tata, circoncision du chat) tournaient subitement le dos à l’événement afin d’apporter aux heureux destinataires du selfie la preuve éclatante et intangible de leur présence en ces lieux.

Laquelle preuve consistait à se prendre soi-même en photo, en tenant du bout de son bras allongé son propre téléphone, transformé pour l’occasion en caméra, tout en tâchant de laisser apparaître en arrière-plan, au-delà du reflet de sa propre bouille, les vagues traces de l’événement en train de se dérouler.

Evènement auquel la plupart du temps le photographe amateur ne s’intéressait guère, préoccupé qu’il était d’accumuler les clichés afin d’en extraire le plus éloquent d’entre eux capable de figurer en tête de sa page Facebook.

Sans compter les innombrables moments de sa vie personnelle, repas au balcon, visite de sa salle de bain, exploration de la chambre à coucher où, pris d’une impulsion subite, considérant l’incroyable opportunité d’apparaître lui-même dans ce décor pourtant ô combien familier, notre photographe en goguette n’hésitait pas à s’auto-mitrailler en multipliant les prises de vue.

Le tout afin d’obtenir un selfie voué à échouer quelques millièmes de secondes plus tard dans la carcasse du téléphone de sa compagne occupée à cette heure à arroser les fleurs à l’autre bout de l’appartement.

selfie

C’est ainsi que le monde moderne se révéla à lui-même : une vaste entreprise d’auto-glorification narcissique où l’individu en mal de repères, balloté dans un siècle sidérant de complexité, se rattachait à la dernière valeur à laquelle il croyait : sa propre personne.

Jusqu’au jour où un singe eut la saugrenue idée d’imiter son lointain descendant et à son tour, s’emparant d’un appareil photo, s’amusa à se prendre en bobine dans les poses les plus diverses et variées.

 

Peu après cette cinglante déconvenue, la mode du selfie disparut, remplacée bien vite par celle du telfie qui consistait à s’appeler soi-même à l’aide d’un logiciel approprié et d’entamer une conversation animée et souvent interminable avec sa propre personne, finissant la plupart du temps en engueulades mémorables, le moi se révoltant contre le surmoi au beau milieu d’un ça en pleine déconfiture.

 

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Du soutien à Israël et de ses conséquences

 

Etre juif n’a jamais été de tout repos.

Depuis la création de l’Etat d’Israël, c’est même devenu une activité à haut risque.

Se risque-t-on à le soutenir même du bout des lèvres qu’on vous regarde comme si vous veniez d’avouer que vous aviez un faible pour les petites culottes d’écolières prépubères.

Dire son soutien à Israël, même en le minorant par la critique de la continuation imbécile et mortifère des colonies, c’est s’exposer à recevoir en retour une bordée d’injures, tir nourri de toutes les composantes de la société, venant vous expliquer à coups d’arguments cinglants que vous vous rendez complices d’un état pratiquant un apartheid infâme, un état sanguinaire sans foi ni loi, spécialisé dans l’extermination de masse, expert dans l’annihilation de peuplades sans défense.

Comment peut-on défendre un pays qui s’en prend de la sorte à de malheureux enfants, qui dégomme à escient des hôpitaux, qui détruit par plaisir des habitations, juste pour apaiser sa soif inextinguible de domination ?

Devant une telle avalanche d’accusations qui sont in-dis-cu-ta-bles puisque ont été vus et revus à la télé les cadavres d’enfants, les hurlements de douleur des mères, les pleurs des pères, on préfère prendre la tangente sachant d’avance que se battre contre des émotions nées de la vision d’images insoutenables ne peut que renforcer ce sentiment de déshumanité prétendument inhérente à la société israélienne.

Les idées les plus censées, les raisonnements les plus fondés, les explications les plus rationnelles ne peuvent rien face à la toute-puissance de l’image.

La télévision, le flux continu d’informations, la prolifération des réseaux sociaux ont rétréci d’une manière si drastique la capacité réflexive de l’être humain qu’il se comporte désormais comme un nourrisson interagissant avec son environnement au seul gré de ces instincts primaires.

J’aime/J’aime pas. C’est bien/ C’est mal. Victime/Bourreau. Coupable/Innocent.

Tenter d’expliquer que le Hamas ne se sert de sa population que pour mener à bien sa mission d’islamiser la Palestine, toute la Palestine, Israël compris, afin d’établir une sorte de califat où serait appliqué, avec un rigorisme implacable, la charia, ne pèsera d’aucun poids au regard de la photo d’un enfant enterré dans son linceul encore suintant de sang.

Redire pour la centième fois qu’on ne peut tout de même pas reprocher à Israël d’avoir pris des mesures afin que les roquettes lancées de la Bande de Gaza restent inopérantes relève de l’attentat intellectuel.

Affirmer que du point de vue de la justice humaine l’intention vaut l’action, que si demain je voulais abattre mon voisin en lui tirant une balle en plein cœur, je resterais coupable d’homicide quand bien même ma tentative aurait échoué, mon voisin averti de mes dispositions ayant eu la précaution de se vêtir auparavant d’un gilet pare-balles.

Argument balayé de la main puisque ces potentielles victimes n’existent pas, d’ailleurs pour preuve on ne les voit jamais, elles n’apparaissent pas dans le hit-parade des morts à déplorer, argument imparable qui vous renvoie dans vos cordes.

Essayer de rappeler que depuis le jour de sa naissance, Israël s’est retrouvé sous le feu continu de ses voisins, qu’il a déjà dû essuyer à maintes et maintes reprises l’agression d’un conglomérat de pays arabes résolus de balancer les juifs à la mer se heurtera à la seule réalité d’aujourd’hui où domine exclusivement l’impression que c’est l’Etat hébreu qui, fort de sa supériorité militaire, cherche à en découdre avec son plus vieil ennemi.

Avancer que même des figures aussi importantes et respectables qu’Amos Oz ou Abraham Yehoshua, des écrivains d’une parfaite rectitude morale qui ont toujours soutenu avec force la création d’un état palestinien, en viennent à justifier dans une certaine mesure l’intervention à Gaza, ne vous sera d’aucune utilité, l’époque n’étant plus à l’écrit mais à l’image.

 

Alors, à nouveau, vous vous retrouvez seul.

Vous contemplez la une des journaux, vous lisez ici et là les commentaires des internautes, vous écoutez le grondement de la populace et vous comprenez pourquoi vous n’avez jamais pu vraiment accorder  votre confiance à l’autre.

Que vous appartenez à un peuple qui, tant qu’il continuera à exister, ne pourra jamais prétendre à la normalité. Qu’on la lui refusera sans cesse. Que quelle que soit la suite des évènements, on trouvera encore et toujours des motifs pour le honnir.

 

Il n’y a pas plus grand bonheur et de plus grande malédiction que d’être né juif.

 

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