Des trous, des p’tits trous… sur Mars

Enfin ! On commençait à désespérer… Le rover Curiosity est arrivé sur Mars début août 2012. Et il a fallu attendre six mois pour qu’il entame enfin son véritable travail : l’analyse de la roche martienne. Avec, en arrière pensée, l’espoir de découvrir des traces de vie ancienne sur la planète rouge.

Le premier forage sur Mars

La Nasa l’a annoncé fièrement le 9 février 2013 : pour la première fois, un robot perce des trous dans le sol de Mars pour récolter des échantillons. Et il faut reconnaître que cela donne un petit frisson. Cela se passe à quelque centaines de millions de km de la Terre. Là-bas, un robot qui pèse autant qu’une petite voiture (900 kg) se promène à la recherche de sédiments sans doute vieux de plusieurs milliards d’années et qui ont été déposés par les immenses rivières qui sillonnaient Mars à cette époque. Que contenait cette eau ? Avait-elle, comme sur Terre, contribué à la création d’une forme de vie ? Curiosity va-t-il en trouver des traces indubitables ? Ce sont les questions qui hantent les chercheurs de la Nasa. Et Mars nous donne une formidable chance d’y répondre avec une très grande précision. En effet, pour les milliards d’exoplanètes qui existent dans la Voix Lactée et les galaxies environnantes, les mesures seront forcément faites à distance. A très grande distance. L’homme n’est pas prêt d’y poser le pied. Avec Mars, tout est différent.

Peu à peu, au fil des missions, comme celle qui a précédé Curiosity avec les robots Spirit et Opportunity arrivés en 2004, la planète rouge devient de plus en plus familière. Ses paysages, qui ressemblent tant à ceux de nos déserts terriens, ont fini par faire partie de notre album photo mental. Certes, comme les images d’une contrée inaccessible pour la grande majorité des hommes. Mais des images dans lesquelles nous savons que nous verrons, un jour, un homme dans sa combinaison blanche. Un homme qui foulera ce sol jaunâtre…

1,6 cm de diamètre sur 6,4 cm de profondeur

Premier acte de ce futur viol d’une terre vierge, un trou percé à l’aide d’un foret. Tout un symbole… Bon, la saillie reste modeste: un diamètre de 1,6 cm sur 6,4 cm de profondeur. Pas de quoi bouleverser une planète. Mais, déjà, quelques surprises. D’abord en raison d’un phénomène optique qui donne l’impression que les trous… sont en relief. Et puis, la couleur. Sous la pellicule de poussière ocre, le sol se révèle gris comme du ciment. Sur Mars, la roche mère est donc aussi blanche que du calcaire sur Terre.

La poudre de roche martienne créée par la mèche de la perceuse est acheminée par des cannelures jusqu’au système de collecte des échantillons du rover, le Chimra. “Nous allons secouer la poudre recueillie pour nettoyer les surfaces internes du mandrin”, explique Scott McCloskey, l’ingénieur responsable du système de forage. “Ensuite, le bras transférera la poudre de la perceuse jusqu’à la pelle où nous pourrons voir enfin l’échantillon”, précise-t-il.

Les opérations ainsi réalisées pour une bonne partie à l’aveugle ont demandé une conception minutieuse. “Construire un outil pour interagir violemment avec des roches inconnues sur Mars impose un programme de développement et de test ambitieux”, confirme Louise Jandura, ingénieur en chef du système d’échantillon qui indique que la mise au point du système de forage a conduit à tester 8 perceuses qui ont réalisé 1200 trous sur 20 types de roche différents sur Terre.

Une fois parvenue au système d’analyse des échantillons, la poudre martienne sera vibrée et tamisée pour retirer les grains supérieurs à 150 microns de diamètre. La petite partie de l’échantillon restante tombera dans les systèmes d’analyse, le CheMin et le SAM, qui pourront alors commencer la mise à nu de la minéralogie et de la chimie martienne.

Michel Alberganti

– Mise à jour le 10 février 2013 avec la vidéo –

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Graphène, le projet du XXIe siècle pour l’Europe

Avec le Human Brain Project qui sera piloté par la Suisse, le projet Graphène a remporté le second Future Emerging Technology (FET) Flagship accordé par la Commission européenne le 28 janvier 2013, à Bruxelles. Soit un financement total d’un milliard d’euros sur 10 ans pour le développement de ce matériau confié à l’université technologique Chalmers, à Göteborg en Suède. Si le choix de ce projet visant l’industrialisation du graphène n’est guère surprenant, il est notable que, après la Suisse, ce soit un “petit” pays européen qui ait été choisi pour piloter un programme disposant d’un financement aussi important. D’autant que l’université la plus logique aurait sans douté été celle de Manchester où travaille Andre Geim qui a obtenu le prix Nobel de physique en 2010 avec son collègue, d’origine russe comme lui, Konstantin Novoselov pour la découverte du graphène ou du moins pour la première mise en évidence expérimentale de l’existence de ce matériau.

1°/ Qu’est-ce que le graphène ?

On le décrit souvent comme le premier matériau en deux dimensions. Ce qui est presque vrai étant donné que sa troisième dimension, l’épaisseur, est égale à la taille d’un seul atome de carbone. Le graphène est donc un matériau plan qui se présente, au microscope, sous la forme d’un réseau hexagonal à 6 atomes parfaitement pur et ordonné. Il forme ainsi un grillage. Pour arriver à l’observer, de longues années de recherche ont été nécessaires alors qu’il existe à l’état naturel… dans les cristaux de graphite. Autrement dit, dans les mines de crayon à papier… Mais de là à isoler une couche unique. Les techniques ont longtemps buté sur la réduction du nombre de couches superposées. Les chercheurs sont parvenus à 100, puis à 10. ils étaient au bord du découragement lorsque, en 2004, André Geim et ses collègues ont réalisé “la” découverte grâce à un bel exemple de sérendipité. Sans vraiment y croire, les chercheurs ont utilisé la bande adhésive d’un rouleau de scotch pour y coller des débris de graphite présents sur une table. Ensuite, ils ont plié cette bande dont la face adhésive était couverte de graphite. En la dépliant, ils en ont réduit l’épaisseur. Et ainsi de suite… Au final, il ne restait plus qu’une couche de graphite. André Geim avait réalisé la découverte qui lui vaudrait le prix Nobel.

2°/ Quelles sont ses propriétés ?

Matériau unique par sa structure, le graphène l’est aussi par ses propriétés. Malgré sa très faible épaisseur, il se révèle extraordinairement résistant et dur tout en conservant une assez grande souplesse. Surtout, c’est le meilleur conducteur de l’électricité connu à ce jour. Il surpasse tous les métaux dans ce domaine. Les chercheurs pensent que sa structure et sa pureté jouent un rôle important. Sans atteindre la supraconductivité, le graphène offre, à température ambiante, un conducteur inégalable.

Mais l’originalité du graphène va bien au delà. Soumis à un champ électrique, il devient le siège de phénomènes quantiques. C’est-à-dire qui ne relèvent pas de la physique classique. Les scientifiques rêvent donc de l’utiliser pour étudier des  phénomènes de la mécanique quantique relativiste qui restait essentiellement le domaine des astrophysiciens ou des physiciens des particules utilisant des instruments gigantesques comme le LHC du Cern qui traque le boson de Higgs. Demain, ils pourront peut-être travailler sur les trous noirs… dans un vulgaire laboratoire, un crayon à la main et du graphène sous leur microscope.

3°/ Quelles sont ses applications ?

Le graphène pourrait devenir le silicium du XXI siècle. Ses caractéristiques de conduction, entre autres, intéressent fortement les fabricants de puces électroniques qui buttent, aujourd’hui, sur les limites du silicium en matière de miniaturisation. Plus les microprocesseurs sont petits, plus ils chauffent. Plus le matériau utilisé est conducteur, moins leur température sera élevée. André Geim estime ainsi que, grâce au graphène, la fameuse loi de Mooore qui prévoit un doublement de la performance des puces tous les 12 à 18 mois, trouvera un second souffle. C’est dire les enjeux industriels du graphène. La maîtrise de sa production peut ouvrir la voie à de nouvelles générations d’ordinateurs.

Le graphène, qui est transparent, pourrait également révolutionner les technologies de fabrication des écrans souples ou des cellules photovoltaïques. Il est également utilisable pour réaliser des capteurs chimiques.  Sans doute d’autres applications viendront s’ajouter à ces perspectives. Comme dans le textile, par exemple.

En fait, le graphène n’est autre que la version plane des nanotubes de carbone. Autrement dit, ces derniers sont constitués de feuilles de graphène mises sous forme cylindrique. Ces nanotubes sont également promis à une multitude d’applications. C’est donc bien une nouvelle génération de matériau qui surgit. Après celle du silicium, l’ère du carbone s’ouvre aujourd’hui. Que l’Europe tente d’y jouer un rôle majeur est donc bien une excellente nouvelle.

Michel Alberganti

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Le “rayon tracteur” de Star Trek sort de la pure science fiction

Moins célèbre de la téléportation (Beam me up, scotty !), le rayon tracteur de Star Trek fascine également les amateur de science fiction. Un rayon de lumière capable d’attraper les objets comme un lasso et de les ramener vers soi… Très utile lorsqu’on ne dispose pas du magnétisme ou de la gravité. Et puis, la lumière est beaucoup plus précise pour viser une cible. Malheureusement, l’effet naturel d’un faisceau de lumière sur un objet est exactement opposé. Le phénomène est connu depuis 1629, date à laquelle Johannes Kepler remarque que la queue de comète est toujours dirigée dans la direction opposée à celle du soleil. Ce sont les rayons lumineux qui dévient les fines particules. Il parait donc très improbable d’utiliser la lumière pour attirer un objet, a fortiori un vaisseau spatial comme dans Star Trek. Autant essayer d’attraper une mouche avec un ventilateur…

Inverser la force de la lumière

Cet obstacle de taille n’a pas découragé une équipe de chercheurs dirigée par Tomas Cizmar, de l’école de médecine de l’université de St Andrew, en Ecosse, et de scientifiques de l’Institut des instruments scientifiques (ISI) de la République Tchèque. Ses travaux ont été publiés dans la revue Nature Photonics le 20 janvier 2013. Il y affirment avoir réussi à inverser le sens de la force exercée par la lumière sur un objet. En la circonstance, il s’agit d’objets microscopiques. Mais l’important est d’avoir trouvé un moyen expérimental pour réussir cette délicate manœuvre.

Le détail du travail des chercheurs est réservé aux abonnés à la revue Nature Photonics ou à ceux qui ont les moyens de payer 30 € pour accéder au texte complet de la publication. Les autres doivent se contenter du résumé, font succinct, dans lequel les chercheurs indique fournir “une géométrie qui génère un “rayon tracteur” et qui démontre expérimentalement son fonctionnement sur les microparticules sphériques de tailles variés, tout comme son amélioration par des structures de microparticules optiquement auto-arrangées”. Les chercheurs ajoutent avoir montré que le mouvement en deux dimensions et le tri dans une dimension peut être contrôlé grâce à la rotation de la polarisation du faisceau incident.

Trier des particules comme les globules blancs

A la BBC qui l’a interrogé, Tomas Cizmar n’a pas donné d’autres précisions sur le système mis au point mais il en a précisé les utilisations possibles. “Les applications pratiques peuvent être superbes et très excitantes. Le rayon tracteur est très sélectif en fonction des propriétés des particules sur lesquelles il agit. Il pourrait donc permettre de prélever certaines d’entre elles dans un mélange. Il pourrait, par exemple, servir à prélever les globules blancs dans le sang”.

Aspirer la queue d’une comète

Pourvoir ainsi “aspirer” les particules désirées dans un mélange serait effectivement précieux. Les Américains travaillent sur un système similaire qui pourrait servir sur une sonde spatiale. Grâce à un laser tracteur, le vaisseau pourrait prélever, à distance, des particules se trouvant à proximité d’un astéroïde ou dans la queue d’une comète. Si l’on reste bien de la tractation d’un vaisseau par un autre, comme dans Star Trek, rien ne dit que cette nouvelle maîtrise de la lumière et de son interaction avec la matière ne pourra pas effectivement trouver un grand nombre d’applications.

Michel Alberganti

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2013 : si les maths, chaque jour, nous étaient contées…

Le problème des maths, finalement, c’est peut-être plus une question de forme que de fond. Imaginez que, tous les jours, en écoutant la radio le matin, en lisant votre journal ou en regardant la télévision le soir, un mathématicien vous raconte une histoire. Pas avec des formules hiéroglyphiques, des mots barbares ou des phrases absconses. Non, juste des histoires qui nous parleraient de la Terre, de la nature, des formes, des couleurs. De notre univers, quoi… Mais alors, quel lien avec les mathématiques ? Eh bien justement, des liens sans fin. Car les maths ne vivent pas uniquement sur les tableaux noirs des profs ou les carnets griffonnés des chercheurs. Les maths existent partout autour de nous. Seulement voilà, souvent, nous l’ignorons.

Prenons la circonférence de la Terre, par exemple. Nous avons tous appris qu’elle mesure 40 000 km. Rares sont ceux, sans doute, qui ont trouvé cette valeur étrangement… ronde. Pas moi, en tous cas… Or, si cette circonférence mesure exactement 40 000 km (à quelques mètres près), cela ne tombe pas du ciel. Dieu, non plus, n’y est pour rien. En fait, ce sont trois mathématiciens qui en ont décidé ainsi : Borda, Condorcet et Lagrange.

Nous sommes alors juste après la Révolution française et les idées foisonnent. Les mathématiciens y contribuent en définissant une unité de mesure. Pour cela, ils décident de prendre une référence incontestable : la Terre. Plus précisément le quart de son périmètre, c’est à dire la distance séparant le pôle nord et l”équateur. Une bien grande distance. Qu’à cela ne tienne : ils la divisent par 10 millions et obtiennent : un mètre. Il s’agit là de la première définition de cette unité de longueur. Si la référence a changé depuis, l’unité persiste.

Voilà une histoire qui donne une autre sonorité au mot “mètre” et un autre rôle aux mathématiciens que celui de gribouiller des formules incompréhensibles. On pourrait imaginer un cours alliant la géographie, l’histoire, la physique et les mathématiques autour d’un tel sujet. Mais, bon, ne rêvons pas… En fait, cette histoire n’est pas issue d’un manuel scolaire, ni même de Wikipédia, mais d’un nouveau site créé à l’occasion de l’année des mathématiques de la planète Terre, décrétée par l’Unesco pour 2013.

Outre de multiples manifestations organisées dans le monde entier, le site français de l’opération publiera, du 1er janvier au 31 décembre 2013, du lundi au vendredi de chaque semaine, une brève, c’est à dire un court article, écrit dans un langage compréhensible par tout le monde. L’histoire du mètre, la première de la série publiée le 1er janvier 2013, est due à la contribution d’Etienne Ghys, directeur de recherche au CNRS et membre de l’Académie des sciences. Elle a été suivie, le lendemain, par une brève de Lionel Roques, de l’Inria, sur la recolonisation par les végétaux après une ère de glaciation. Également passionnante.

Ainsi, l’année 2013 commence bien pour la science. Cette initiative promet de nous tenir en haleine jusqu’à l’arrivée de la comète Ison, bouquet final de l’année. Elle donnera aussi du grain à moudre à tous les professeurs de mathématiques soucieux d’attirer l’attention des leurs élèves en leur montrant que l’abstraction pure n’est pas le seul destin des mathématiques ni leur seul usage dans notre vie de tous les jours.

Michel Alberganti

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2012 : les temps forts de la science

L’année 2012 ira à son terme. Plus vraiment de doute désormais. La fin du monde, promise par certains Cassandre, sera pour plus tard… Et les Mayas, involontaires fauteurs du trouble, sont entrés dans une nouvelle ère avant tout le monde, le 21 décembre dernier, après avoir sans doute bien ri de la panique engendrée par la fausse interprétation de leur antique calendrier. Du coté de la vraie science, la cuvée 2012 restera sans doute dans les annales comme particulièrement riche. Aussi bien en succès qu’en couacs. Pour faire bonne mesure, revenons sur trois grands moments dans ces deux catégories et sur leurs principaux acteurs.

Trois succès :

1°/ Peter Higgs, le père du boson

4 juillet 2012. Un jour peut-être, lorsque les manuels de physique auront intégré un minimum d’histoire des sciences (espérons que cela arrive avant la prochaine nouvelle ère du calendrier Maya), la photo de Peter Higgs ornera cette date du 4 juillet. Dans l’amphithéâtre du CERN, Peter Higgs pleurait. Il racontera ensuite que l’ambiance y était celle d’un stade de foot après la victoire de l’équipe locale. Ce jour là, les résultats des deux expériences menées avec le LHC ont montré qu’ils convergeaient vers la valeur de 125 GeV. Soit la masse du boson dont l’existence avait été prédite par Peter Higgs et ses collègues, parmi lesquels  François Englert et Tom Kibble sont toujours vivants, en… 1964. Fantastique succès, donc, pour ces théoriciens qui voient, 48 ans plus tard, leurs calculs vérifiés par l’expérience. Il faudra néanmoins attendre le mois de mars 2013 pour une confirmation définitive des résultats. Et septembre pour un possible (probable ?) prix Nobel de physique pour Peter Higgs. En 2013, notons donc sur nos tablettes:  “Le boson”, saison 2.

2°/ Curiosity, le rover sur Mars

6 août 2012. 7h32 heure française. Le rover Curiosity se pose en douceur sur Mars après un voyage de 567 millions de km qui a duré 8 mois et demi. Comme au CERN un mois plus tôt, c’est l’explosion de joie dans la salle de contrôle du Jet Propulsion Laboratory (JPL) de la Nasa à Pasadena (Californie). C’est la première fois qu’un robot de ce calibre (3 x 2,7 m sur 2,2 m de haut, 899 kg) est expédié sur une planète du système solaire. Près de 7000 personnes ont travaillé sur le projet qui a coûté la bagatelle de 2,5 milliards de dollars. On comprend le soulagement apporté par l’atterrissage réussi. Pour autant, la véritable mission de Curiosity a commencé après cet exploit. Et force est de constater qu’elle n’a pas, pour l’instant, été à la hauteur des espoirs mis en elle. Le comble étant que c’est plutôt son petit prédécesseur, Opportunity, qui fait l’actualité avec ses découvertes géologiques. Curiosity, de son coté, doit découvrir des traces de vie passée sur Mars. Pour lui aussi, la saison 2 pourrait être décisive.

3°/ Serge Haroche, prix Nobel de physique

9 octobre 2012. A Stockolm, la nouvelle prend presque tout le monde par surprise. Alors que l’on attendait le Britannique Peter Higgs, c’est le Français Serge Haroche qui décroche le prix Nobel de physique avec l’Américain et David J. Wineland. Après des années où ce prix allait plutôt à des chercheurs en physique appliquée, c’est le grand retour du fondamental.  Avec Serge Haroche, la mécanique quantique et le chat de Schrödinger sont à l’honneur. Le Français, issu du même laboratoire de l’Ecole Nationale Supérieure (ENS) de la rue d’Ulm, à Paris, que deux précédents Nobel, a réussi à maintenir des particules dans cet état improbable où la matière hésite et se trouve, un bref instant, dans deux situations contradictoires. Comme un chat qui serait à la fois mort et vivant… Seuls les physiciens quantiques peuvent imaginer un tel paradoxe. Serge Haroche a été plus loin et a réussi à maintenir réellement des particules dans cet état assez longtemps pour faire des mesures. La médiatisation de son prix Nobel a révélé l’impact de cette distinction dont la science française avait besoin. Depuis Claude Cohen-Tannoudji en 1997, elle n’avait été primée qu’une fois avec Albert Fert en 2007.

Trois échecs :

1° / Les neutrinos trop rapides

16 mars 2012 : Eh oui ! Einstein a dû en rire dans sa tombe. Les scientifiques du CERN, eux, ont dû rire jaune en devant admettre, en mars 2012, que les neutrinos ne vont pas plus vite que la lumière. Pas moins de 6 mois ont été nécessaires pour débusquer l’erreur de manip. Une vulgaire fibre optique mal branchée. Au CERN de Genève ! Le temple de la physique doté du plus gros instrument, le LHC ! Avec des milliers de scientifiques venus du monde entier… Bien entendu, l’erreur est humaine. Ce qui l’est aussi, sans être aussi défendable, c’est le désir irrépressible de communiquer le résultat d’une expérience avant d’être absolument certain du résultat. Risqué, surtout lorsque ce résultat viole l’une des lois fondamentales de la physique : l’impossibilité de dépasser la vitesse de la lumière établie par Albert Einstein lui-même. Nul doute que la mésaventure laissera des traces et favorisera, à l’avenir, une plus grande prudence.

2°/ Les OGM trop médiatiques

19 septembre 2012. Gilles-Eric Séralini, biologiste de l’université de Caen, avait préparé son coup de longue date. Plus de deux ans pour mener à terme une étude d’impact des OGM et de l’herbicide Roundup sur une vie entière de rats. Et puis, le 19 septembre, coup de tonnerre médiatique. Le Nouvel Obs titre: “Oui, les OGM sont des poisons”. Si les physiciens du CERN ont manqué de prudence, nos confrères de l’hebdomadaire n’ont pas eu la moindre retenue lorsqu’ils ont conçu cette Une. Les ventes ont sans doute suivi. Le ridicule, aussi, lorsqu’il est apparu que l’étude était très contestable. En déduire que les OGM sont des poisons, en laissant entendre “pour les hommes”, est pour le moins regrettable. En revanche, le coup de Gilles-Eric Séralini a mis en lumière les carences des procédures de test des OGM. Sil en reste là, ce sera une terrible défaite, aussi bien pour la science que pour les médias.

3°/ Voir Doha et bouillir…

8 décembre 2012. Si c ‘était encore possible, la 18e conférence internationale sur le réchauffement climatique qui s’est tenue à Doha, capitale du Qatar, du 26 novembre au 6 décembre 2012 avec prolongation jusqu’au 8 décembre, aura battu tous les records de ridicule. On retiendra deux images : la grossièreté du vice-Premier ministre Abdallah al-Attiya et l’émotion de Naderev Saño, négociateur en chef de la délégation des Philippines, parlant du typhon Bopha qui a fait plus de 500 morts dans son pays. Quelle distance entre ces deux personnages. Aucun dialogue n’a pu s’établir dans ce pays qui est le plus pur symbole de la contribution éhontée au réchauffement climatique (numéro un mondial en émission de CO2 par habitant). La conférence s’est soldée par un échec cuisant. Un de plus. Au point de conduire à s’interroger sur l’utilité de tels rassemblements. Forts coûteux en énergie.

Michel Alberganti

Photo: Vue d’artiste. REUTERS/NASA/JPL-Caltech

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La gravité se déplacerait bien à la vitesse de la lumière

La gravitation reste la force la plus mystérieuse de notre univers. Pourtant, les plus grands physiciens en percent progressivement les énigmes depuis des siècles. Après Newton et sa pomme, c’est Einstein qui en a fait le centre de son œuvre avec sa théorie de la relativité générale qui n’est autre qu’une théorie de la gravitation. Malgré tout, il reste assez inconcevable qu’une plume et un marteau tombent à la même vitesse dans le vide. Les expériences de Galilée du haut de la tour de Pise, même si elles datent de la fin du 16ème siècle, n’y peuvent rien. La gravité reste à la fois le plus banal et le plus étrange des phénomènes dont nous faisons l’expérience quotidienne.

Rien de plus simple que sa définition: l’agent qui confère son poids aux objets ayant une masse. Sur Terre, la gravité colle nos pieds sur le sol et fait tomber la cruche à l’eau. A l’échelle humaine, il s’agit d’un équivalent du boson de Higgs à celle des particules élémentaires. J’entends d’ici les physiciens hurler devant un tel rapprochement. Pourtant, c’est justement ce qu’ils cherchent depuis près d’un siècle. Comment unifier la physique de l’infiniment petit (quantique) et celle de l’infiniment grand (relativité générale). Quelle loi sera valable dans ces deux univers qui semblent, aujourd’hui, aussi inconciliables que lorsque, avant de mourir il y a exactement 350 ans, Pascal écrivait dans ses Pensées au sujet de l’homme :

“Infiniment éloigné de comprendre les extrêmes, la fin des choses et leur principe sont pour lui invinciblement cachés dans un secret impénétrable, également incapable de voir le néant d’où il est tiré, et l’infini où il est englouti”.

Premières preuves expérimentales

C’est dire si le moindre progrès en matière de gravité est d’importance. Et, justement, les Chinois prennent le relais en affirmant que, d’après leurs calculs, ils ont découvert “les premières preuves expérimentales montrant que la gravité se déplace à la vitesse de la lumière”. Pour arriver à cette conclusion, Tang Keyun, chercheur à l’Institut de géologie et de géophysique dépendant de l’Académie chinoise des sciences (ACS) et son équipe ont étudié, entre autres, le phénomène des marées terrestres.

Dans un article publié dans la version en ligne de la revue Chinese Science Bulletin de décembre 2012, les chercheurs expliquent qu’il sont partis de la loi de la gravitation de Newton dans laquelle la gravité agit de façon instantanée. Pourtant, la théorie de la relativité restreinte d’Einstein indique que la vitesse de la lumière ne peut être dépassée. “La vitesse de la gravité doit donc être finie”, en déduisent les chercheurs. D’autant que la relativité générale du même Albert Einstein laisse entendre que des ondes gravitationnelles devraient se déplacer à la vitesse de la lumière. Difficile à vérifier dans un laboratoire. La gravité ne peut être arrêtée ou isolée. Elle est partout…

Éclipses de soleil et marées

Les chercheurs chinois ont commencé leurs travaux en… 1997. Ils ont mené 6 observations sur les éclipses totales ou partielles du soleil et sur les marées terrestres. Résultat : les vitesses de gravitation enregistrées varient de 0,93 à 1,05 fois la vitesse de la lumière avec une approximation de 5%. Soit une mesure clairement centrée sur la vitesse de la lumière. Une chance. Pas de vitesse supérieure à la vitesse de la lumière comme on a pu le croire, un temps, avec les neutrinos du CERN. Néanmoins, si la mesure expérimentale de la vitesse de la gravité est certainement un  exploit, elle ne nous renseigne guère sur sa nature profonde. “Qu’est ce que la gravité ?” reste une question fondamentale. La réponse vaut un prix Nobel assuré.

En attendant, en 2013, nous pourrons faire l’expérience de l’absence, ou presque, de ce phénomène grâce au film Gravity d’Alfonso Cuaron, avec Sandra Bullock et George Clooney en perdition dans leur scaphandre dérivant vers l’immensité de l’espace…

Michel Alberganti

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Boson de Higgs: le CERN voit double

Décidément, on ne s’ennuie jamais au CERN de Genève. L’an dernier, à la même époque, les chercheurs pensaient que les neutrinos pouvaient se déplacer à la vitesse de la lumière. Démenti le 16 mars 2012. Cette année, on n’y parle que du boson de Higgs et de sa dernière aventure : un dédoublement imprévu, incongru et inquiétant.

Les résultats de l’expérience Atlas publiés le 13 décembre 2012 font en effet apparaître non plus un mais… deux bosons de Higgs. La détection de l’existence de la fameuse particule est obtenue grâce aux désintégrations engendrées par les collisions de particules à l’intérieur de l’accélérateur LHC du CERN. Le 4 juillet 2012,  le CERN a annoncé avec enthousiasme avoir obtenu les preuves expérimentales de l’existence d’un nouvelle particule ayant de très fortes probabilités d’être le boson de Higgs. Mais ils ont, semble-t-il, négligé alors de mentionner que l’une des deux expériences qui traque le boson, avait obtenu, dès le mois de mai 2012, la trace de… deux bosons.

Au lieu d’une seule particule dont la masse serait d’environ 125 gigaélectronvolts (GeV), voilà qu’elles seraient deux avec des masses de 123.5 GeV et 126.6 GeV. Une différence de 3 GeV qui pose un réel problème aux physiciens car elle est à la fois trop petite et trop grande. Trop petite pour qu’il s’agisse de deux particules très différentes. Trop grande pour que la différence de 3 GeV soit due à des erreurs d’expérience ou de calcul. D’autant que les données ont été triturées dans tous les sens pour tenter d’éliminer cette aberration. Sans résultat. L’expérience montre une désintégration du boson en deux photons. Sorte de boson Higgs-Higgs…

Est-ce grave ? Oui…

Après tout, est-ce si grave ? Si cette observation était confirmée, il semble que oui. L’apparition d’une seconde particule au lieu d’un seul boson de Higgs mettrait en effet à mal pas moins de deux théories. Le modèle standard, d’abord, pour lequel le boson de Higgs unique a été imaginé dans les années 1960. Sa découverte doit conforter cette théorie. En cas de bosons de Higgs multiples, une autre théorie, la supersymétrie, reprendrait-elle du poil de la bête? Rien n’est moins sûr. Selon un physicien du CEA interrogé par Globule et télescope, “la supersymétrie, qui prévoit plusieurs Higgs, n’envisage pas qu’ils soient si proches en masse”.

Trop proches ou trop éloignés… Le double boson de Higgs va faire jaser pendant des mois car il faudra attendre mars 2013 pour la prochaine mise à jour des résultats publiés par le CERN à partir de l’énorme quantité de données fournies par les expériences. Mars ? Le mois de la révélation de la bourde des neutrinos plus rapides que la lumière… Attendons donc la cuvée 2013 des révélations de printemps du CERN. Pour Peter Higgs, candidat au prix Nobel de Physique, ce délai risque d’être particulièrement pénible. C’est en effet en début d’année 2013 que la sélection des candidats est faite. Déjà, l’an dernier, ce calendrier, lui a été fatal. Sera-t-il victime, l’an prochain, du double Higgs ?

Michel Alberganti

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La petite leçon de physique du saut de Felix Baumgartner

Le 14 octobre 2012, Felix Baumgartner est devenu le premier homme à monter à près de 40 000 mètres d’altitude et à sauter pour revenir sur Terre après une chute libre suivie par une descente en parachute. Derrière l’exploit sportif, que nous avons relaté en détail, on trouve une jolie leçon de physique. En effet, l’expérience de Felix Baumgartner illustre de façon spectaculaire plusieurs phénomènes auxquels nous sommes soumis sans en avoir conscience: la gravité, la pression atmosphérique, la température de l’air au dessus de nos têtes ou la vitesse du son. En revanche, pour ce qui concerne le passage du mur du son avec une simple combinaison, le parachutisme autrichien est aujourd’hui le seul être humain à l’avoir expérimenté. Lorsqu’il se trouvait à 39 km d’altitude, quelles étaient les forces auxquelles il était soumis ? Comment ces forces ont évolué au cours de son saut ? Autant d’exercices de physique dont les professeurs vont maintenant pouvoir s’emparer. Leurs élèves, eux, devront se projeter vers le ciel, armés de quelques formules.

1°/ La gravité et le poids

La gravité est l’un des phénomènes les plus mystérieux de notre univers. Elle se traduit par une attraction exercée par une masse sur une autre. La Terre sur chacun de nous, par exemple. Mais aussi la Terre sur la Lune, le Soleil sur la Terre… Une attraction dont on cherche encore à préciser le support physique. Pour l’expliquer, Albert Einstein a dû imaginer une déformation de l’espace-temps… C’est dire ! Ce qui est certain, c’est qu’une force s’exerce sur une masse lorsqu’elle se trouve au voisinage d’une autre. Plus la masse d’un objet est importante, plus l’attraction qu’elle exerce sur une autre masse est grande. C’est pour cette raison que les verres tombent par terre et non l’inverse… Mais aussi que la gravité sur la Lune, est très inférieure à celle qui règne sur Terre. Là bas, elle n’atteint que 1,6 m/s2, soit 16,7% de celle qui règne sur Terre. Par ailleurs, plus les verres tombent de haut, plus ils ont le temps d’accélérer et plus leur vitesse au moment de l’impact est grande. Et plus ils risquent de se casser. C’est pour cette raison qu’il vaut mieux tomber du premier étage d’un immeuble que du 6e.

Cette accélération d’une masse attirée par une autre, c’est justement cela, la gravité. Elle se mesure comme une accélération. A la surface de la Terre, cette accélération est égale à 9,81 m/s2, le fameux “g” que nous avons tous découvert à l’école. Appliquée à une masse, cette accélération lui donne… un poids.  Grâce à Newton et à sa pomme légendaire, nous savons que le poids est égal au produit de la masse par l’accélération due à la pesanteur, via la célèbre formule : P = mg. Dès que l’on quitte le plancher des vaches, les choses se compliquent.

C’est ainsi que nous retrouvons Felix Baumgartner, debout sur la petite marche accrochée à sa capsule. A 39 km de la surface de la Terre échappe-t-il à l’attraction terrestre, à la gravité ? Si c’était le cas, et s’il se trouvait vraiment dans l’espace, il ne serait simplement… pas tombé. Difficile, dans ce cas, de franchir le mur du son. En fait, il était encore beaucoup trop près de la Terre pour atteindre l’apesanteur que connaissent les locataires de la Station spatiale internationale qui croise à quelque 400 km d’altitude et qui équilibre la gravitation grâce à la force centrifuge engendrée par sa rotation autour de la Terre (*). Dix fois plus haut que Felix. Pour ce dernier, la perte de gravité est restée très limitée à environ 1,2%. S’il pèse 80 kg à la surface de la Terre, il en pesait encore environ 79 au bord de sa nacelle, juste avant de sauter.

2°/ La pression atmosphérique et la température

Si Felix Baumgartner est tombé au lieu de flotter, c’est donc à cause de la gravité. Mais pourquoi était revêtu de cette combinaison sous pression qui rendait ses gestes si difficiles. En raison de la différence de pression atmosphérique, bien entendu…

A la surface de la Terre, en plus de la gravité, nous subissons la pression exercée par l’atmosphère. Soit une épaisseur d’environ 100 km d’air au dessus de nos têtes… Cette pression diminue lorsque l’on s’éloigne de la Terre. Dans ce cas, l’impact de l’altitude du saut de Felix est loin d’être négligeable. Lors de sa montée, il a franchi environ 40% de l’épaisseur de l’atmosphère. Pourtant, la différence de pression extérieure était nettement inférieure à ces -40%. En effet, la densité de l’air n’est pas régulière lorsque l’on s’élève. Ainsi, elle n’atteignait plus qu’environ 1% de la densité sur Terre à 39 km d’altitude. Dès 5500 mètres d’altitude, la pression atmosphérique a déjà perdu 50% de sa valeur au niveau de la mer. Il n’en reste que 10% à 16 km d’altitude. Et la pression extérieure, elle aussi, était 100 fois plus faible que sur Terre lorsque Félix a ouvert l’écoutille de sa nacelle. Sans sa combinaison pressurisée, son corps se serait dilaté, presque comme on le voit au cinéma lorsqu’un astronaute perd cette protection dans l’espace.

Gravité similaire, densité de l’air et pression atmosphérique divisées par 100. Et la température ? On imagine un froid plus que polaire, spatial ! Grosse erreur. En fait, la température varie très fortement, dans les deux sens, lorsque l’on s’élève. Nous assimilons altitude et refroidissement parce que notre expérience est limitée aux plus hauts sommets des montagnes terriennes. Quelques milliers de mètres seulement. Dans cette zone, et jusqu’à environ 10 km (l’altitude des avions de ligne), la température baisse en effet régulièrement pour atteindre quelque -60°C. Elle se maintient ainsi jusqu’à 20 km et ensuite, elle commence à remonter. Aux environs de 45 km, elle est pratiquement revenue à 0°C et elle recommence à baisser à nouveau à partir de 50 km pour descendre jusqu’à -100°C à 80 km avant de remonter à partir de 90 km. A l’extérieur de l’atmosphère, au delà de 100 km d’altitude, la température devient très élevée (300 à 1600°C). Mais l’absence de molécules d’air, dans le vide, empêche cette chaleur se transmettre et de brûler les astronautes. Néanmoins, leur combinaison blanche reflète les rayons du soleil le plus possible. La température élevée à la sortie de l’atmosphère démontre la protection que cette dernière apporte à la Terre.

Revenons à Felix qui, lui, n’est pas allé jusqu’à l’espace. Il se trouve, en revanche, dans une situation idéale pour réaliser son exploit. Forte gravité et faible densité d’air. Sans ces conditions, il n’aurait jamais atteint la vitesse de 1342 km/h, ni franchi le mur du son.

3°/ La vitesse du son

Contrairement à la lumière qui est une onde électromagnétique, le son est une onde produite par la vibration mécanique du milieu dans lequel elle se propage. Pas de milieu, pas de son. Une règle que les réalisateurs de films se déroulant dans l’espace ont longtemps ignorée. Jusqu’à Stanley Kubrick et 2001, l’odyssée de l’espace. Si Felix avait eu un compagnon, et s’il avait pu se passer de sa combinaison, il n’aurait guère pu se faire entendre. Pas assez d’air à faire vibrer pour acheminer correctement le son de sa voix. En revanche, cette atmosphère raréfiée présente un avantage considérable pour la chute libre : elle ne freine pas, ou très peu, le corps de Felix. Au moins pendant les premières minutes de sa chute. C’est ainsi qu’il a pu accélérer jusqu’à dépasser la vitesse du son. Là où cela se complique, c’est que cette vitesse dépend… également de l’altitude. Plus précisément de la densité de l’air, de la pression et de la température. Comme nous l’avons déjà expliqué, à environ 30 km, la vitesse du son est de 1087 km/h, contre 1200 km/h au sol. En fait, Felix n’a pas fait de détail et battu la vitesse du son… même au niveau de la mer.

Avant son saut, la seule véritable question sans réponse concernait l’effet du passage du mur du son sur un homme sans autre protection qu’une combinaison. On a pu voir à quel point Felix était ballotté pendant la partie la plus rapide de sa chute. Les vibrations du passage du mur du son l’ont probablement déstabilisé. Il reconnaît lui-même qu’il a craint de perdre connaissance. Dès que l’air est devenu assez dense, sa chute s’est ralentie et il a pu reprendre le contrôle de son vol, en professionnel du parachutisme. Son arrivée au sol, sur ses deux jambes, a montré qu’il avait retrouvé tous ses moyens avant d’atterrir. Bel exploit. Et belle leçon de physique.

Michel Alberganti

Mise à jour : “et qui équilibre la gravitation grâce à la force centrifuge engendrée par sa rotation autour de la Terre” a été rajouté grâce à la remarque judicieuse de François Desvallées.

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Le saut du mur du son en direct

Suivez la tentative de franchissement du mur du son en chute libre par Felix Baumgartner en direct:

Les données de l’exploit:

Altitude du saut : 38,750 km
Vitesse à atteindre : 1087 km/h

Les images de la montée (captures d’écran):

 

 


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