L’effet placebo fonctionne aussi sans passer par la conscience

Avec l’effet placebo, on va de surprise en surprise. On a d’abord cru qu’il fallait que tous les protagonistes croient profondément à l’efficacité d’un  produit ou d’un traitement pour que le patient en bénéficie. C’est à dire qu’il soit soigné malgré l’absence de tout principe actif. D’où les précautions prises pendant les essais en double aveugle pour tester l’efficacité d’un nouveau médicament. Le médecin prescripteur ne devait surtout pas savoir s’il prescrivait la nouvelle molécule ou un placebo.

Inutiles mensonges

Ensuite, on a découvert que tous ces mensonges ne servaient à rien. Et même que, lorsque le patient sait qu’il prend un placebo, l’effet positif se produit quand même. Difficile à comprendre. Le cerveau, la conscience, ne jouerait donc aucun rôle. Ce que l’on sait, dans ce cas que l’on absorbe une pilule de sucre ou de vitamine, n’agirait pas sur les réactions du corps… Ce dernier recevrait donc un autre message. Et il réagirait en fonction d’une information erronée pour déclencher des mécanismes contribuant à la guérison. Des mécanismes qui ne se seraient pas activés sans ce processus improbable. Le corps aurait besoin d’un subterfuge, même grossier et cousu de fils blanc, pour décider de se soigner. Dans la mesure de ses possibilités, certes. Mais reconnaissez que l’on nage en plein mystère. Et qu’il s’agit de l’une des histoires les plus extraordinaires que l’organisme humain nous ait donné à découvrir. D’autant qu’il fonctionne dans les deux sens. A l’effet placebo, positif, répond l’effet nocebo, négatif.

Sans être au courant…

Cette histoire ne s’arrête pas là. Des chercheurs viennent d’en écrire un nouveau chapitre en découvrant que les effets placebo et nocebo n’ont tout simplement pas besoin de passer par la conscience pour agir. Ils lèvent sans doute ainsi un coin essentiel du voile pour tenter de comprendre les précédentes étapes. “Une personne peut avoir une réponse placebo ou nocebo même si elle n’est pas au courant d’une quelconque suggestion d’amélioration ou anticipation de détérioration”, affirme Karin Jensen, de l’hôpital Massachusetts General et de la Harvard Medical School, auteur principal de l’article paru dans les Proceedings of the National Academy of Sciences (PNAS) du 10 septembre 2012.

Conscience court-circuitée

Pour parvenir à cette affirmation assez incroyable, les chercheurs n’ont pas hésité à mettre en doute l’un des fondements de l’explication de l’effet placebo. Malgré les précédentes découvertes, il restait établi que ce phénomène fonctionnait grâce à une sorte de projection mentale du patient liée à l’espérance d’une guérison ou à la crainte d’une aggravation de sa maladie. Les chercheurs sont néanmoins partis d’une autre découverte, récente, concernant les mécanismes de récompenses ou de punition chez l’être humain. Certains travaux montrent que ces réactions pouvaient se produire très rapidement, sans que les patients aient besoin de consciemment enregistrer leurs stimulations dans leur cerveau. La neuro-imagerie a montré que certaines structures du cerveau, comme le striatum et l’amygdale, peuvent traiter des stimuli avant même qu’ils parviennent à la conscience. Elles peuvent ainsi avoir des effets directs sur la cognition et le comportement de l’individu. Tout se passe alors comme si la conscience était court-circuitée… Un tel phénomène peut-il se produire avec l’effet placebo ?

Deux expériences

Pour répondre à cette question, Karin Jensen et son collègue Jian Kong ont réalisé deux expériences avec 40 volontaires en bonne santé (24 femmes, 16 hommes, âge moyen de 23 ans). Dans la première, les chercheurs ont appliqué une source de chaleur sur le bras des participants tout en leur montrant des images de visages humains masculins sur un écran d’ordinateur. La première image était associée à une faible douleur de brûlure et la seconde image à une forte douleur. Les participants devaient ensuite noter leurs sensations de douleur sur une échelle de 0 à 100, 0 correspondant à une absence totale de douleur et 100 à la douleur la plus forte imaginable. Les patients ne savaient pas que la chaleur qui leur était appliquée restait rigoureusement la même au cours de l’expérience. Comme on pouvait le prévoir, la douleur ressentie s’est trouvée liée à l’association avec les images. Les participants ont noté, en moyenne, leur niveau de douleur à 19 lorsque les images montraient des visages associés à de faibles douleurs (effet placebo) et à 53 lorsque les images étaient associées à de fortes douleurs (effet nocebo). Jusque-là, rien de bouleversant. Juste la confirmation de l’effet placebo classique.

Images invisibles

Dans une seconde expérience, les participants ont reçu la même stimulation sous forme de chaleur. Les images ont également été projetées sur l’écran d’ordinateur mais, cette fois, d’une façon si brève que le cerveau ne pouvait les reconnaître consciemment. Après cette succession de flashes, les participants ont noté leur niveau de douleur : 25 de moyenne en réponse aux visages associés à une faible douleur et 44 pour les visages associés à une forte douleur. Les effets placebo et nocebo se sont donc produits de façon similaire malgré l’absence de conscience de l’association visage-douleur.

Nouvelle voie

Ted Kaptchuk, directeur du Program in Placebo Studies (PiPS) au Beth Israel Deaconess Medical Center/Harvard Medical School, coauteur de l’article, déclare : “Ce n’est pas ce que les patients pensent qu’il va se produire, c’est ce que le cerveau non conscient anticipe, malgré l’absence de toute pensée consciente, qui influence le résultat. Ce mécanisme est automatique, rapide et puissant. Il ne dépend pas des délibérations mentales et du jugement. Ces découvertes ouvrent une voie entièrement nouvelle vers la compréhension de l’effet placebo et des rituels de la médecine”.

Michel Alberganti

 

11 commentaires pour “L’effet placebo fonctionne aussi sans passer par la conscience”

  1. Bonjour,

    À mon sens, il n’y a pas de corrélation entre les expériences et la conclusion.

    Sincèrement, je trouve que cet article ressemble plus à un plaidoyer pour l’homéopathie qu’à une étude sérieuse sur les placebos. Le meilleur est qu’il n’est fait mention nulle part d’homéopathie. Ce qui me fait penser cela est simple : décoreller la conscience de l’effet du placébo redonne une justification pseudo-scientifique à l’homéopathie.

    J’ai regardé sur internet ce qu’on peut trouver à propos des auteurs de cet article et ils sont pas mal branchés “alternatif”… (maintenant… des liens sortis de leur contexte ne valent pas grand chose)

    Ted J. Kaptchuk
    http://www.jameslindlibrary.org/illustrating/articles/early-use-of-blind-assessment-in-a-homeopathic-scientific-experi

    Irving Kirschb
    http://laughingmysocksoff.wordpress.com/2008/03/03/sugar-pills-are-the-future/

    Jacqueline Raicek
    http://www.naturaltherapyforall.com/us/acupuncture/west-boylston/jacqueline-raicek/4206

    Randy L. Gollub
    http://www.emsworld.com/article/10323588/alternative-remedies-in-the-mainstream

    Martin Ingvar
    http://www.thecamreport.com/2007/05/karolinska-institutet-appoints-professor-of-integrative-medicine/#more-1015
    http://bulletin.sciencebusiness.net/News/NewsArticle.aspx?ArticleId=72192

    Jian Kong
    http://online.liebertpub.com/doi/pdfplus/10.1089/acm.2007.0524

  2. @Guillaume – Dommage que vous ne précisiez pas pourquoi vous ne voyez pas de corrélation entre les expériences et la conclusion… Par ailleurs, en ce qui concerne l’homéopathie, je pense que vous vous trompez de débat. Les défenseurs de l’homéopathie rejette l’action par effet placebo et plaident pour une action directe des comprimés homéopathiques. Ce sont ceux qui contestent la réalité de cette action qui estiment que l’homéopathie ne peut prétendre qu’à la fonction de placebo. Par ailleurs, les patients sont conscients, tout comme le médecin, de la prise d’un traitement homéopathique. Tout cela explique pourquoi ce mot n’apparaît pas dans l’article. Il est tout simplement hors sujet.

  3. @michelalberganti – Ce que je veux dire est qu’avec ce genre d’étude, un nouvel argumentaire pro homéopathie (ou pseudo médecine alternative) peut apparaître :”regardez, l’homéopathie (ou ce que vous voulez) est un placebo et les placebos ça marche même à l’insu du patient”

    Notez que la seule chose que j’ai contre ces “autres médecines” est qu’à force de lobbying on tente d’imposer leur charge à la collectivité.

  4. Géniale cette étude !
    Elle montre bien l’impact des informations qu’on laisse parvenir au cerveau…
    Les images stressantes, même si on n’a pas l’impression qu’elles nous stressent, libèrent quand même les hormones du stress !
    Et produisent leur effets délétères !
    Merci de ces infos !
    Luc Mister-no-stress

  5. je partage l’avis de guillaume même si je ne vois pas le rapport avec l’homéopathie, si ce n’est que l’effet placebo lui est couramment opposé. L’effet placebo se veut un processus sortant complétement du cadre des perceptions sensorielles a court terme, conscientes ou pas. Si elle est effectivement susceptible de montrer l’influence de messages subliminaux sur les perceptions a court terme, le rapprochement de cette expérience avec l’effet placebo est pour le moins osé.

  6. […] #split {}#single {}#splitalign {margin-left: auto; margin-right: auto;}#singlealign {margin-left: auto; margin-right: auto;}#splittitlebox {text-align: center;}#singletitlebox {text-align: center;}.linkboxtext {line-height: 1.4em;}.linkboxcontainer {padding: 7px 7px 7px 7px;background-color:#eeeeee;border-color:#000000;border-width:0px; border-style:solid;}.linkboxdisplay {padding: 7px 7px 7px 7px;}.linkboxdisplay td {text-align: center;}.linkboxdisplay a:link {text-decoration: none;}.linkboxdisplay a:hover {text-decoration: underline;} function opensplitdropdown() { document.getElementById('splittablelinks').style.display = ''; document.getElementById('splitmouse').style.display = 'none'; var titleincell = document.getElementById('titleincell').value; if (titleincell == 'yes') {document.getElementById('splittitletext').style.display = 'none';} } function closesplitdropdown() { document.getElementById('splittablelinks').style.display = 'none'; document.getElementById('splitmouse').style.display = ''; var titleincell = document.getElementById('titleincell').value; if (titleincell == 'yes') {document.getElementById('splittitletext').style.display = '';} } CMO 2.0 Conversation with Paul Levy, CEO at Beth Israel Deaconess Medical Center – Human 1.0Foot And Ankle Doctors In Los Angeles l Dangerous Activities for Your Feet and AnklesTV series “Childrens Hospital” (2008) DownloadNew autism lab will grant speech to young patients11th Anniversary of September 11, 2001 terrorist attack that we will never forgotten- More evidence obesity may lower IVF success-Globule et télescope […]

  7. Le sujet à l’air intéressant mais cet article est mal redigé, confus ; on se perd dans d’improbables méandres. En fait on ne comprend pas grand chose, et comme vous dites, tout cela reste un “grand mystère”. (L’experience des visages associés à la douleur est particulierement mal expliquée). Dommage.

  8. Bonjour, d’accord avec “Michelalberganti”
    Tout d’abord, merci pour cet article qui cite une source directement accessible, fournit le protocole, et que ne surinterprête pas les résultats ! 😉
    Ensuite, il me semble que cette étude intérroge avant tout l’effet placebo, et par là notre construction de la réalité sociale. Encore plus loin, elle explore la nature de la conscience/inconscience (echelle discrète ou continue).
    Bref, ça m’apparaît être sérieux et digne d’intérêt.

  9. @Guillaume > N’oubliez pas que la définition de l’efficacité d’un traitement médicamenteux, c’est précisément d’être *plus* efficace qu’un placebo.
    L’homéopathie étant *autant* efficace qu’un placebo, même si ça marche, ça ne marchera pas aussi bien qu’un médicament classique (ayant fait ses preuves, s’entend).
    En outre, les industriels de l’homéopathie n’admettront jamais que leurs produits sont des placebos ni que « les placebos, ça marche », puisque dans ce cas leurs clients comprendront qu’ils peuvent obtenir un effet identique en croquant un bout de sucre à moins de 2 €/kg au supermarché du coin : ce qui est d’ailleurs presque ce que font déjà ces clients (saccharose + lactose, le sucre classique étant du saccharose avec un peu de glucose/fructose/etc.), à part qu’ils croquent des bouts de sucre vendus presque deux fois plus cher au kilo que l’argent !

    Prix au kilo de l’Oscillococcinum vs. prix au kilo de l’argent :
    • http://www.boiron.fr/Nos-produits/Medicaments-homeopathiques/Medication-familiale/Pathologies-hivernales/Oscillococcinum (encadré « Que contient-il ? ») => 1 dose = 1 gramme ;
    • http://www.prixmedicament.com/medicament/3281100/oscillococcinum/duree-180 => prix moyen de la boîte 6 doses (6g) sur les 6 derniers mois = 9.23 € => ~1538 €/kg ;
    • http://www.metaux-precieux.fr/informations/cours-dachat-actuels/argent/ => prix du lingot d’argent d’1 kg ce matin = 822.72 € => rapport des prix au kilo = 1.87 !

  10. L’expérience ne démontre rien du tout, elle est complètement à côté de la plaque.
    Les effets placebo et nocebo augmentent ou diminuent les défenses de l’organisme ce qui se traduit généralement par une accélération de la guérison ou une aggravation du mal.
    Rien de tel dans l’expérience, si on agit sur les défenses de l’organisme (contre quoi d’ailleurs ?) on ne le sait pas car on ne le mesure pas. Que mesure-t-on ? L’opinion du sujet sur une perception subjective, non seulement ça n’a pas de rapport avec les défenses de l’organisme mais en plus on sait depuis longtemps que les images subliminales influencent les opinions…

  11. Regardez du coté du Tao, vous aurez peut-être des réponses

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